La Cour suprême, le 18e amendement et le Volstead Act

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Franck Laffaille

Franck Laffaille est Professeur de droit public à la Faculté de droit de Villetaneuse (IDPS)-Université de Paris 13 (Sorbonne-Paris-Cité). Menant une partie de ses recherches en droit italien, il tient deux chroniques, l’une à la Revue Française de Droit constitutionnel, en droit politique italien, l’autre à la Revue du Droit Public, en jurisprudence italienne.

Après l’adoption du 18e amendement et du Volstead Act, la Cour suprême doit arbitrer les contentieux liés à l’entrée en vigueur de la prohibition. Deux thèmes – classiques – méritent étude : la forme de l’Etat (fédéral) et les libertés (individuelles et collectives). Aussi l’accent est-il mis sur les relations entre l’Etat fédéral et les entités fédérées puis sur la violation (présumée) des droits fondamentaux par le nouveau droit positif. 

Le 18ème Amendement[1] instituant la Prohibition (« the noble experiment »…) est ratifié (par 36 Etats sur 48)[2]  en janvier 1919 ; entré en vigueur en janvier 1920, il est abrogé en 1933 à la suite de l’adoption du 21ème Amendement. Quant au Volstead Act, il est adopté en novembre 1919. Intitulé « An act to prohibit intoxicating beverages, and to regulate the manufacture, production, use, and sale of high-proof spirits for other than beverage purposes, and to insure an ample supply of alcohol and promote its use in scientific research and in the development of fuel, dye, and other lawful industries » – il a pour finalité de :  

« prohibit intoxicating beverages »,

« regulate the manufacture, production, use and sale of high proof spirits for other than beverage purposes »,

« insure an ample supply of alcohol and promote its use in scientific research and in the development of fuel, dye and other lawful industries ».

En vertu du Volstead Act, « no person shall manufacture, sell, barter, transport, import, export, deliver, furnish or possess any intoxicating liquor except as authorized by this act.” The act defined intoxicating liquor as any beverage over 0.5% alcohol ».

Le Volstead Act  est vidé de sa substance par le Blain Act (1933) puis privé d’effet par l’entrée en vigueur du 21ème Amendement[3].

Durant les premières années de la Prohibition, la politique jurisprudentielle de la Cour suprême est de sensibilité « dry » : nombre de requêtes sont rejetées[4] sur le fondement du 18ème Amendement ; cela emporte lecture restrictive des droits constitutionnels des citoyens. La lecture de la Constitution et du Volstead Act est favorable  aux prétentions répressives des autorités[5]. Que l’on songe à Ford v. US (1927) permettant d’incriminer un complice n’ayant jamais pénétré sur le territoire américain ; que l’on songe à Dodge v. US (1926) validant une procédure criminelle alors même que les agents publics ayant réalisé une perquisition n’en avait pas le droit sur le seul fondement du Volstead Act ; que l’on songe à Hebert v. Lousiana (1926) jugeant régulière l’inculpation d’une personne par un Etat pour des actes ayant déjà donné lieu à condamnation pour violation du Volstead Act ; que l’on songe à Raffel v. US (1926) estimant qu’une personne ayant témoigné volontairement a renoncé au bénéfice du Vème Amendement (no self-incrimination) ; que l’on songe à Van Oster v. Kansas (1926) déclarant régulière la confiscation des voitures transportant de l’alcool…

L’avènement d’une jurisprudence régressive en matière de protection des droits fondamentaux –  favorable à une lecture pro-prohibition des textes applicables – est manifeste dans ces deux décisions emblématiques que sont US v. Sullivan(1927, 5ème amendement et question fiscale) et Olmstead v. US (1928, 4ème amendement et écoutes téléphoniques). Cependant, une évolution se dessine à la fin des années 20, la Cour suprême opérant lecture plus libérale du 4ème Amendement (Carroll v. US, 1925 ; Marron v. US, 1927 ; US v. Lefkowitz, 1932).

On ne saurait limiter les enjeux constitutionnels inhérents à l’application du18ème Amendement et du Volstead Act à la seule question des droits fondamentaux des citoyens. Quid des droits des Etats fédérés au regard de la consolidation du pouvoir fédéral[6] ? La relation Etat/Etats est au cœur d’une dialectique constitutionnelle qui traverse toute l’histoire des Etats-Unis depuis 1787. Le temps de la Prohibition est encore un moment juridique éclairant cette relation, complexe et synonyme d’antagonismes normatifs. Pour Robert Post, jamais les Etats-Unis n’avaient tenté, à ce point, de « control the details of everyday life »[7] ; il y voit l’« Emergence of the American Administrative State »[8]. Post entrevoit le 18ème Amendement avant tout sous l’angle de l’extension des pouvoirs du Gouvernement fédéral, au détriment des Etats, au détriment des droits des citoyens des Etats : « The Eighteenth Amendment represents the first effort in our history to extend (sic) directly by Constitutional provision the police control of the federal government to the personal habits and conduct of the individual »[9].

Parmi les décisions emblématiques de la Cour suprême, deux d’entre elles visent directement le 18ème Amendement : l’une concerne l’hypothèse de sa ratification référendaire par un Etat (Hawke v. Smith, Secretary of State of Ohio, 1920), l’autre de sa procédure d’adoption par un Etat (State of Rhode Island v. Palmer, 1920). Dans ces deux cases, la Cour se fait la gardienne du pacte fédéral, limitant l’autonomie constitutionnelle des entités fédérées. Enfin, la relation Etat/Etats doit s’appréhender à l’aune de la très concrète coopération entre agents fédérés et agents fédéraux pour faire respecter les dispositions du 18ème Amendement et du Volstead Act. La Cour suprême refuse que des agents fédéraux s’immiscent dans une procédure relevant du droit d’un Etat (Byars v. US, 1927) ; elle refuse encore que des agents fédérés agissent pour le compte du Gouvernement fédéral (Gambino v. US, 1927).

La jurisprudence de la Cour suprême mérite d’être analysée à l’aune de la protection des droits fondamentaux des citoyens (I) puis de la forme fédérale de l’Etat et des droits  des entités fédérées (II). Il va de soi qu’il existe une étroite connexion entre ces deux axes. Protéger les droits des Etats, n’est-ce pas – dans l’esprit américain – protéger les droits des citoyens contre l’arbitraire du « big governement » fédéral ?

I. Prohibition et droits fondamentaux des citoyens

S’agissant de l’application du 5ème Amendement (en matière fiscale), la Cour suprême (US v. Sullivan, 1927) développe une jurisprudence restrictive (A). Il en va de même du  respect de la vie privée protégée par le 4ème Amendement (Olmstead v. US, 1928) (B). Vers la fin des années 20  (Carroll v. US, 1925 ; Marron v. US, 1927 ; US v. Lefkowitz, 1932), le 4ème Amendement fait l’objet d’une lecture plus libérale (C).

A) De l’impôt et de la « no self-incrimination » (5ème Amendement[10]) : US v. Sullivan (1927)

Il est une question au croisement de la théorie des droits fondamentaux et de la philosophie morale : un Etat peut-il – doit-il – imposer les activités illégales ? L’interrogation  a donné lieu à intense débat juridique. Dans une décision de 1946 (Commissioner v. Wilcox), la Cour suprême assume « the ‘borrower’ analogy »[11] (l’analogie de l’emprunteur) pour refuser la taxation des détournements de fonds (« embezzled funds »). Avec cette notable phrase : « la turpitude morale n’est pas la pierre angulaire de l’imposition ». Dans une décision de 1952 (Rutkin v. US), la Cour suprême estime que l’argent tirée de l’extorsion est imposable ; la décision – 5-4 – fait l’objet de « dissenting opinions » virulentes (cf. Justice Black).

Quid du temps de la Prohibition ? Le 16ème Amendement  autorise le Congrès à imposer tout revenu. Avec le « Revenue Act » de 1913, le Congrès  impose les revenus de différentes sources, incluant « any lawful business carried on for gain and profit ». Trois ans plus tard, dans le « Revenue Act » de 1916, le mot « lawful » est supprimé, sans que le Congrès explique un tel changement sémantique[12]. Advenue la Prohibition, les juges ne peuvent pas ne pas se poser la question de la cohérence de la taxation d’une activité illégale. Ils en viennent  même – parfois – à se poser la question de la moralité même de la taxation : le Gouvernement ne s’avilit-il pas en taxant des revenus issus d’activités illégales ? Justice Manton – « concurring » dans une décision de la Circuit Court of Appeals (Second Circuit) Steinberg v. US (1926) – le pense : « It is hard to conceive of Congress ever having in mind that the government be paid a part of the income, gains, or profits derived from successfully carrying on this crime, or intering into a combinaison with the person engaged in this unlawful business to ascertain how and to what extend he shall be taxed (…). It is incredible to believe that it was intended that a bootlegger be dignified as a taxpayer for his illegal profit, so that the gouvernment may accept his money for governmental purposes, as it accepts the money of the honest merchant taxpayer ». Longue, la citation est parlante, à double titre : imposer un contrebandier revient – selon Justice Manton[13] – à lui octroyer une forme de dignité juridique et morale ; taxer des revenus tirés d’une activité illégale revient, pour le Gouvernement, à déchoir. Cette thèse – celle du « silent partner »[14], d’un Etat avili car imposant des revenus illégaux – est absurde : cela reviendrait à ne pas sanctionner de telles activités donc à les encourager, à affaiblir l’Etat en ses capacités budgétaires, à affaiblir l’Etat en son pouvoir de coercition, à jeter le trouble dans l’esprit de l’honnête citoyen (autant frauder). Reste que l’on ne peut manquer de cogiter sur le lien – incontournable en droit fiscal – entre imposition et déduction. Dès lors que des revenus sont imposables, n’ouvrent-ils pas droit à déduction ? Justice Manton – toujours dans son opinion concurrente in Steinberg v. US (1926, Circuit Court of Appeals, Second Circuit) – abonde en ce sens. Taxation il y a, déduction il y a ; le commande, selon lui, la volonté même du Congrès quand il taxe « net rather than gross income ». Dans US v. Sullivan (1927) la Cour suprême taxe les revenus illégaux et rejette toute possibilité de déduction. Mais elle ne peut s’empêcher d’écrire que le requérant – en tentant de jouer avec le lien taxation/déduction – a fait preuve de témérité : « It is urged that if a return were made the défendant (…) would be entitled to deduct illegal expenses such as bribery. This by no means follows, but it will be time enough to consider the question when a taxpayer has the temerity to raise it »[15].

Dans Sullivan v. US (1926), l’U.S. Court of Appeals for the Fourth Circuit estime que la notion même de justice s’en trouve lésée si l’Etat impose les activités légales et n’imposent pas les activités illégales. Le dénommé Sullivan refuse de déclarer des revenus, obligation découlant des dispositions du Revenue Act de 1921. Sullivan est réputé avoir violé le National Prohibition Act pour avoir transporté de l’alcool par bateau à destination de Charleston (Caroline du Sud). Il argue avoir le droit de ne pas déclarer les revenus tirés de la vente d’alcool dans la mesure où cela reviendrait à s’incriminer ; cela emporterait violation du droit de ne pas témoigner contre soi-même (5ème Amendement : « nor shall be compelled in any criminal case to be a witness against himself »). La considération morale est d’évidence : en cas de non taxation, la violation de la loi permet aux lawbreakers de prospérer, au détriment des honnêtes citoyens dont la charge fiscale s’accroît à due proportion des illégalités commises. En une (fausse) question, les juges de l’U.S. Court of Appeals for the Fourth Circuit s’indignent : « Can it be said in all such cases Congress intended to tax the lax-abiding, and let the criminal go free ? ». La réponse est négative bien évidemment. En dépit de cela, la décision de l’U.S. Court of Appeals for the Fourth Circuit surprend : les revenus du « bootlegger » sont bien taxables mais il est protégé, en vertu du 5ème Amendement, par le « privilege againts self-incrimination ». L’absence de déclaration de revenus conduit à l’imposition ; elle ne fait pas disparaître les garanties inhérentes au 5ème Amendement.

Dans US v. Sullivan (1927), la Cour suprême estime que les revenus tirés du commerce illégal d’alcool sont soumis à l’impôt sur le revenu et doivent faire l’objet d‘une idoine déclaration. Quant au 5ème Amendement, il  ne protège pas le contribuable qui refuse délibérément de déclarer ses revenus alors même que la loi l’y contraint. La décision de l’U.S. Court of Appeals for the Fourth Circuit est donc « reversed ». Selon Mabel Willebrandt – l’assistante de l’US attorney general – l’IRS (Internal Revue Service) pouvait à bon droit imposer le sieur Sullivan. Justice Holmes rédige la décision de la Cour. En une paradoxale formule célèbre, Holmes écrit : « It would be an extreme if not an extravagant application  of the Fifth Amendment to say that it authorized a man to refuse to state the amount of his income because it had been made in crime ». Le raisonnement de Holmes est simple : le National Prohibition Act ne peut être lu comme permettant à un contribuable de ne pas déclarer ses revenus au motif qu’ils sont illégaux. Une activité illégale doit être taxée, comme une activité légale ; affirmer le contraire reviendrait à exonérer d’impôt crimes et délits, ce qui représenterait une étrange et injuste application de la norme juridique. Ce que reproche Holmes à Sullivan est de confondre silence et probité : Sullivan ne peut prétendre utiliser les ressources constitutionnelles le protégeant alors même qu’il viole, délibérément, le droit en vigueur. En tant que citoyen, il lui revenait de déclarer ses revenus puis de défendre sa cause en justice si le gouvernement entamait des poursuites. Quant à la présumé violation du 5ème Amendement, elle est liquidée à l’ultime ligne de la décision (courte d’ailleurs, une page) : « It is urged that if a return were made the defendant would be entitled to deduct illegal expenses such as bribery. This by no means follows, but it will be time enough to consider the question when a taxpayer has the temerity to raise it ». En l’espèce, Sullivan n’est pas obligé de témoigner contre lui-même en avouant qu’il est un contrebandier. Il sera temps, ajoute Holmes, de réfléchir sur la chose le jour où un contribuable – réalisant des opérations illégales – aura le courage de déclarer ses revenus.

Le Sullivan case s’avère d’une importance fondamentale pour lutter contre la criminalité organisée ; la Cour suprême donne une substantielle argumentation juridique à l’IRS. En 1931, Al Capone est condamné à 11 ans de prison pour fraude fiscale. Dans la décision de l’US Court of Appeals for the Seventh Circuit (1931), il est (notamment) question de la violation de la section 80 du titre 18 de l’USCA. Avant 1918, le texte s’appliquait seulement aux « offenders who filed fraudulent claims against the government ». En 1918, le texte est complété :  « or for the purpose and with the intent of cheating and swindling or defrauding the Government of the United States, or any department thereof, or any corporation in which the United States of America is a stockholder, shall knowingly and willfully falsify or conceal or cover up by any trick, scheme, or device a material fact, or make or cause to be made any false or fraudulent statements or representations ». La finalité de cette modification est – comme le souligne la Cour – d’élargir les personnes susceptibles d’être frappées par la loi. Al Capone intègre la catégorie des « offenders who, by their cheating, swindling, or defrauding, caused a « pecuniary or property loss » to the government ».  Direction Alcatraz.

B) Respect de la vie privée et « unreasonable searches and seizures » (4ème amendement[16]) : Olmstead v. US (1928)[17]

Olmstead saisit la Cour suprême après avoir été condamné pour violation du National Prohibition Act ; à la tête d’un gang, cet ancien policier transportait de l’alcool entre Seattle et le Canada. Il reproche à l’administration fédérale d’avoir réuni des preuves contre lui par le biais d’écoutes téléphoniques. Selon Olmstead, de tels enregistrements – dès lors qu’ils sont utilisés à charge – violent le 4ème Amendement (« unreasonable searches and seizures »). Il s’agirait de perquisitions et saisies non motivées. La Cour suprême – dans une 5-4 décision rédigée par Justice Taft – rejette la requête d’Olmstead. Quand bien même le Congrès a consacré le caractère secret des conversations téléphoniques – au point de rendre inadmissibles les preuves ainsi recueillies – la Cour suprême refuse d’opérer une sur-interpétation du 4ème Amendement : « The policy of protecting the secrecy of telephone messages by making them, when intercepted, inadmissible as evidence in federal criminal trials may be adopted by Congress through legislation, but it is not for the courts to adopt it by attributing an enlarged and unusual meaning to the Fourth Amendment ». Que permet le 4ème Amendement et que ne permet-il pas ? Selon la Cour, il n’empêche pas « what was done here » : il n’y a pas eu de perquisitions et de saisies (« searchings and seizures »), les preuves ont été recueillies via des écoutes téléphoniques (« and that only » ajoute le juge), aucune habitation (domicile, local professionnel) n’a fait l’objet d’une quelconque visite. Faisant œuvre d’historienne, la Cour remonte à l’invention du téléphone – récente – pour en conclure que cette technique de communication ne peut être protégée par le 4ème Amendement : « The language of the Amendment cannot be extended and expanded to include telephone wires reaching to the whole world from the defendant’s house or office. The intervening wires are not part of his house or office any more than are the highways along which they are stretched ». Ce qu’explique la Cour est qu’une conversation téléphonique ne constitue pas un lieu (house, office,  highways) ; certes, mais la protection de la vie privée se limite-t-elle à de tels lieux. Ne faut-il pas étendre la protection inhérente au 5ème Amendement ? C’est à cela même que le juge refuse de répondre ; et il n’y répond pas car il ne pose pas la question. De la sémantique en droit et de l’interprétation restrictive des textes lorsque l’interprète authentique – le juge – en décide…  

Dans une opinion dissidente célèbre, Justice Brandeis parle au nom de la minorité. Brandeis rappelle l’essence même de la philosophie libérale, appliquée aux « due process clauses of the Fifth and Fourteenth Amendments » : poser des limites aux pouvoirs du gouvernement. Cela implique de ne pas autoriser les Etats-Unis ou les Etats à utiliser certaines techniques modernes pouvant rapidement devenir « arbitraires ou oppressives ». Parcourant le temps et le temps du droit, Brandeis rappelle la nécessité d’adapter la Constitution « to a changing world » afin de garantir les droits individuels des citoyens contre les « specific abuses of power ». Lui apparaît totalement inapproprié le raisonnement d’une Cour qui se refugie derrière une interprétation littérale des Amendements évoqués. Le droit est l’enfant de l’expérience des maux (« evils ») et il ne faut pas figer le langage juridique lorsque ces maux changent de nature. Après avoir cité l’une des plus fameuses phrases du Chief Justice Marshall (« We must never forget that it is a constitution we are expounding »),Brandeis en vient à réfléchir sur l’essence même des constitutions. Loin d’êtres des dispositions éphémères, elles ont vocation à permettre aux hommes de réfléchir sur « what has been » et « what may be ». Si prévaut l’interprétation restrictive de la Cour, alors les droits proclamés jadis « might be lost in reality ». Partisan d’une « living Constitution », Brandeis  lit le 4ème amendement à l’aune des évolutions technologiques permettant au gouvernement d’envahir la sphère privée des citoyens. Il s’en indigne par le truchement d’une (fausse) interrogation : « Can it be that the Constitution affords no protection against such invasions of individual security ? ». La réponse ne peut qu’être négative. L’opinion de Brandeis se résume in fine en une formule célèbre : « the right to be let alone », droit qualifié de plus « complet » et « d’appréciable » par les hommes défenseurs d’une civilisation centrée sur les libertés. Revenant à l’espèce proprement dite, Brandeis opère un troublant constat : le Gouvernement ne possède pas – en dehors des preuves recueillies au moyen des écoutes téléphoniques – d’éléments à charge contre le requérant. L’entière accusation repose sur l’existence de ces écoutes, illégales sous l’empire du droit en vigueur à Washington. La Cour peut-elle accepter ces documents recueillis en violation du « state law », uniques supports conduisant à la condamnation d’Olmstead ? A défaut de réponse explicite (cela n’est guère utile), Brandeis assène une formule éclairante : « The Eighteenth Amendment has not, in terms, empowered Congress to authorize anyone to violate the criminal laws of a State ». A fortiori, peut-on ajouter, les agents du Gouvernement. C’est ici que Brandeis en vient à faire le procès du Gouvernement : « innocent », ce dernier l’était assurément lorsque ses agents ont procédé en violation du droit de Washington. Mais une fois connues les opérations illégales, pèse sur le Département de la Justice une « moral responsibility for the officers’ crimes ». Remarquable renversement de perspective juridique : le délit sur lequel il convient de s’appesantir n’est pas celui du requérant mais celui du Gouvernement, devenu « lawbreaker ». Pour éduquer les citoyens à la vertu, il importe d’avoir confiance tant dans les organes gouvernementaux que dans la justice ; les cours ne peuvent accepter des preuves qui sont le fruit de l’illégalité tant il importe de protéger « the judicial process from contamination ». En des passages emplis de moralité, Brandeis appelle à la vigilance : « Crime is contagious. If the Government becomes a lawbreaker, it breeds contempt for law; it invites every man to become a law unto himself; it invites anarchy ».

C) Du 4ème Amendement, en sa lecture juridictionnelle libérale (Carroll v. US, 1925 ; Marron v. US, 1927 ; US v. Lefkowitz, 1932)

A partir de la fin des années 20, la Prohibition est regardée sous un angle moins favorable. Les restrictions aux droits fondamentaux et le développement exponentiel du trafic d’alcool n’y sont pas étrangers. L’emblématique Olmstead case(1928) révèle que la Prohibition change la conception même des relations Etat/Citoyen quant au degré de liberté(s) dont ce dernier est titulaire. Hautement révélatrice est la position du Gouvernement fédéral : au moment même où la Cour rend sa décision, il annonce renoncer à l’utilisation des écoutes téléphoniques dans le cadre des procédures d’enquête[18]. Le Jones Act (1929) – présenté en introduction comme un texte durcissant les sanctions – doit faire l’objet d’une lecture complémentaire : il est aussi un texte révélant la mansuétude des pouvoirs publics envers les « casuals offenders ». Sévérité normative accrue pour la criminalité organisée, compréhension normative assumée pour le citoyen lambda ayant pêché sans esprit de « conspiracy » (entente délictueuse). Dans Marron v. US (1927), la Cour estime que tout mandat de perquisition doit, en vertu du 4ème Amendement, décrire avec précision les objets recherchés et susceptibles d’être saisis. Par la négative, un agent public ne peut pas  saisir des objets non mentionnés dans le mandat (en l’espèce, des registres et relevés de facture). Cependant,  Marron v. US se lit avec des yeux prudents : les juges estiment régulière une arrestation, sans mandat, d’une personne suspectée de vendre des boissons interdites. Dans US v. Lefkowitz (1932), des agents de l’administration – titulaires d’un mandat – arrêtent des personnes dans des bureaux qui ne sont pas présumés contenir de l’alcool. Les agents poursuivent leurs recherches dans d’autres pièces du bâtiment et découvrent des documents indiquant l’existence d’un trafic de boissons. Selon les requérants, nous sommes en présence d’une violation du 4ème Amendement qui interdit toute « unreasonable search » au nom de la préservation du « right of privacy ».  La Cour fait droit à leur requête : un mandat d’arrêt ne doit pas servir de prétexte pour rechercher des preuves, au détriment du droit au respect de la vie privée. Si l’administration peut arrêter un individu sur le fondement d’un mandat, elle ne peut perquisitionner, sur ce seul fondement, son domicile et retenir des documents à titre de preuves. La notion de raisonnabilité joue un rôle important dans cette décision. La Cour – par la voix de Justice Butler – se pose cette question : les fouilles entreprises sont-elle « raisonnables » dans la mesure où elles découlent d’un mandat d’arrêt, et non d’un mandat de perquisition ? Le 4ème Amendement doit s’interpréter « liberally to safeguard the right of privacy » ; il interdit toute fouille irraisonnable. Dans US v. Lefkowitz, la Cour se réfère à une décision de 1765 de la King’s Bench, connue pour les propos de Lord Camden : le droit anglais n’autorise pas à fouiller dans les papiers des citoyens, y compris pour résoudre les crimes les plus atroces. A défaut, « the innocent would be confounded with the guilty ». Suivant ce précédent, la Cour suprême ajoute que ce « great case » était chéri par ces hommes d’Etat qui rédigèrent la Constitution de 1787. Existe-t-il référence juridique plus majestueuse que celle des « framers » ? La décision US v. Lefkowitz  marque un tournant, synonyme d’une lecture plus libérale du 4ème Amendement et donc plus protectrice de la vie privée des citoyens. La décision Taylor v. US(1932) confirme cette tendance : les agents de l’administration ne peuvent pas pénétrer, sans mandat, dans le garage d’un citoyen, alors même – qu’attirés par l’odeur – ils découvrent 122 caisses de whisky. Ils arrêtent Taylor qui sort alors de son domicile. La Cour condamne l’attitude des agents – « inexcusable » – ayant effectué une fouille « unreasonable » ; les preuves recueillies ont été obtenues illégalement et ne peuvent servir de fondement à une quelconque accusation. La Cour insiste sur les garanties constitutionnelles découlant du 4ème Amendement ; le requérant ne peut être dépouillé de ces (ses) garanties en raison de la découverte d’objets ou d’une une odeur susceptible de constituer un délit.

Cependant, il est un domaine où la Cour n’opère pas lecture libérale du 4ème Amendement : lorsqu’il s’applique aux automobiles. « The automobile exception » est systématisée dans Carroll v. US (1925) : la Cour opère une distinction entre les habitations et les voitures, ces dernières ne bénéficiant pas du statut protecteur des premières. Sans doute les juges n’ont-ils pas voulu par trop empêcher l’activisme de l’administration dans sa lutte contre la contrebande. Carroll v. US mérite notamment intérêt en raison du révélateur « dissent » qui y figure : à partir du milieu des années 20, les « dissenting opinions » se développent dans les décisions relatives à la Prohibition. Dans  Carroll v. US, Justice McReynolds délivre une ardente opinion dissidente. Il critique la décision de la Cour en ce qu’elle autorise l’incrimination – pour violation du Volstead Act – de personnes ayant fait l’objet d’un banal contrôle routier. Les agents officiant alors ne possédant aucun mandat, Justice McReynolds estime irrégulière la procédure. Le Volstead Act n’autorise pas l’arrestation de citoyens et la saisie de leurs biens sur le fondement de simples suspicions ; tout comme il ne donne pas le pouvoir à l’administration d’utiliser des preuves illégalement recueillies. Cela vaut d’autant, ajoute  Justice McReynolds, que les lois pénales s’interprètent et s’appliquent strictement, « in harmony with rules of the common law ». En vertu d’une jurisprudence constante, une arrestation ne peut survenir que sur le fondement d’un mandat, sauf en présence d’un délit commis devant un agent public. En l’espèce, l’alcool – élevé au rang de preuve – a été saisi à la suite d’une arrestation illégale ; les droits constitutionnels des requérants ont été violés. Ce que  Justice McReynolds critique vertement est ce que l’on pourrait dénommer doctrine de la suspicion ; toute suspicion peut conduire à une arrestation, toute arrestation peut conduire à tomber sous le coup du Volstead Act. Or, il n’existe aucun « reasonable belief » de penser – lorsque la voiture fait l’objet d’un contrôle policier – que les requérants étaient susceptibles de commettre un délit prohibé par le Volstead Act. De la présomption d’innocence et de la garantie des droits dans un Etat de droit constitutionnel…

II. Prohibition et forme fédérale de l’Etat

Avec la décision Hawke v. Smith, Secretary of State of Ohio (1920), la Cour suprême refuse qu’un Etat s’arroge le droit de ratifier (ou non) un amendement (ici le 18ème) par voie référendaire (A). Avec la décision State of Rhode Island v. Palmer(1920), la Cour statue sur la notion de « concurrent power » in Section 2 du 18ème Amendement (B). Enfin, par les décisions Byars v. US (1927) et Gambino v. US (1927), la Cour trace les frontières de compétence entre droit fédéral et droit fédéré. Elle encadre l’interventionnisme des agents fédéraux et des « state officers  » prétendant faire respecter le 18ème Amendement et le Volstead Act (C).

A) De la ratification référendaire, par un Etat, du 18ème Amendement : Hawke v. Smith, Secretary of State of Ohio(1920)                                                                                                                                             

Question théorique : un Etat fédéré peut-il – par le biais d’un référendum – demander à ses citoyens de ratifier (ou non) un amendement constitutionnel adopté par le Congrès ? Case (Hawke v. Smith, 1920) : la Constitution de l’Ohio – prévoyant que les amendements apportés à la Constitution fédérale peuvent être soumis à référendum – viole-t-elle l’article V de la Constitution[19] de 1787 ? La Cour suprême répond non à la première question, et oui à la seconde. L’Assemblée générale de l’Ohio ratifie the 18ème Amendement en janvier 1919, devenant l’un des 36 Etats intégrant dans leur ordre juridique les prescriptions prohibitionnistes. Mais un amendement à la Constitution de l’Ohio (adopté en 1918) prévoit que les amendements à la Constitution des Etats-Unis sont soumis à référendum après leur ratification par la législature d’Etat. Le secrétaire d’Etat de l’Ohio, Smith, organise l’opération référendaire en vue de soumettre à référendum le 18èmeAmendement. Un citoyen, Hawke, demande l’arrêt du processus référendaire, en l’espèce l’édiction des bulletins de vote ; selon Hawke, l’Amendement  constitutionnel adopté par Ohio viole l’Article V de la Constitution des Etats-Unis. En vertu de ce dernier, les amendements à la Constitution fédérale sont ratifiés (ou non) par les (seules) législatures d’Etat ; la Constitution de 1787 ne prévoit pas de ratification référendaire, par les Etats, en matière d’amendements constitutionnels. Hawke est débouté par une Court of Common Pleas, par une Court of Appeals puis par la Supreme Court of Ohio. La Cour suprême des Etats-Unis fait droit à sa demande (reversed). Justice Day délivre l’opinion de la Cour suprême. Faisant lecture du 18ème Amendement, Day rappelle qu’il est donné un « concurrent power » (Section 2) aux Etats (et au Congrès) pour donner force obligatoire à l’interdiction édictée dans la Section 1 (cf. ci-après State of Rhode Island v. Palmer (1920) pour la notion de « concurrent powers »). Il revient aux Etat d’adopter une « appropriate legislation ». Selon la volonté du constituant fédéral, le 18ème Amendement ne peut devenir droit positif qu’après avoir été ratifié par les ¾ des législatures d’Etat (dans les 7 ans). L’argument théorique principal de la Cour suprême se résume en une phrase, mythique : « the Constitution and the laws of the United State are the supreme law of the land ». Emanant du peuple (le juge ne craint guère de recourir à cette classique et irénique fiction), le texte de 1787 est devenu « the Constitution of the people of the United States » (McCulloch v. Maryland, 1819). L’article V est d’une importance fondamentale dans l’esprit des « framers » de 1787, conscients qu’un texte, a fortiori la loi suprême du pays, doit évoluer avec le temps pour s’adapter aux enjeux nouveaux. Ensuite, tout est question de « method » : la méthode de ratification est laissée à la discrétion du Congrès qui peut opter soit pour une ratification via les législatures,  soit via des conventions. Ce pouvoir de « determination of the method of ratification is the exercise of a national power specifically granted by the Constitution ». De la méthode en droit constitutionnel : le pouvoir de ratification échoit – par la volonté du Congrès – ou aux législatures ou à des conventions. Tertium non datur : point de troisième voie. Le processus de ratification – au niveau fédéré – des amendements constitutionnels fédéraux est enserré dans cette limite duale. La Cour suprême réalise – pour appuyer son argumentation – un passage d’uchronie constitutionnelle : les framers auraient pu adopter une autre méthode, ils auraient pu demander au peuple de ratifier les amendements par un vote. Ils ne l’ont pas fait, et la lecture de l’article V de la Constitution ne laisse planer « no doubt in its interpretation ». Une législature d’Etat ne peut modifier la méthode choisie par le constituant fédéral. Reste une question à laquelle il convient de répondre, afin de rejeter les prétentions de l’Ohio : qu’entendent les framers quand ils écrivent que la ratification doit être réalisée « by legislatures » ? Pour l’Ohio, le peuple est inclus dans le terme « legislatures ». Pour la Cour, cette expression est dépourvue d’ambiguïté. Par « legislature », il faut entendre le corps représentatif adoptant les lois au nom du peuple souverain. Le terme est d’ailleurs utilisé à plusieurs reprises dans la Constitution fédérale avec un tel sens (Article I §2, Article I §3…). Il ne faut donc pas sur-interpréter le terme « legislature » afin d’englober le peuple adoptant (ou rejetant), par référendum, une norme ; lorsque le peuple s’exprime directement, il ne forme pas une « legislature ». L’argumentation de l’Ohio est qualifiée de « fallacious » par la Cour : on ne saurait confondre le peuple votant via référendum et une assemblée législative, tout comme on ne saurait confondre un acte législatif adopté par une assemblée élue et un acte adopté par le peuple via référendum. En d’autres termes et par la négative, « ratification  by a State of a constitutional amendment is not an act of legislation within the proper sense of the word ». Pour écarter le peuple du processus de ratification, la Cour opère même raisonnement analogique. Elle s’appuie sur Hollingsworth v. Virginia (1798) : un amendement constitutionnel n’a pas à être soumis au président des Etats-Unis ; point de veto possible car l’adoption d’un amendement (« substantive act ») n’entre pas dans la catégorie du  « ordinary business of the legislation ». Revenant à question fédérale/fédérée, la Cour concède certes que le pouvoir législatif des Etats dérive de la volonté des citoyens de l’Etat ; le juge ne saurait nier les fondements mêmes du principe démocratique. Mais il nuance immédiatement le propos qui – développé à son acmé – conduirait à la nullification des normes fédérales et de la Constitution des Etats-Unis. Tout est question de source en droit, notamment en droit constitutionnel : le pouvoir de ratifier un amendement constitutionnel fédéral trouve « its source in the Federal Constitution ». De la souveraineté du peuple fédéré enserrée dans les rets de la Source initiale, la Constitution fédérale… Les Etats possèdent le pouvoir de ratifier un amendement constitutionnel fédéral ; une telle prérogative vaut sur le seul fondement de la Constitution de 1787. La souveraineté du peuple est fédérale avant d’être fédérée, la volonté du peuple fédéré ne peut annihiler la volonté du constituant fédéral. Source et temporalité : ce qui a été accepté en 1787 commande présentement la relation Etat/Etats/peuple. Le raisonnement de la Cour semble indiscutable : « The act of ratification by the States derives its authority from the Federal Costitution to which the State and its people have alike assented ». Tout dépend en réalité – comme toujours – des prémisses posées : car on pourrait tout aussi bien arguer que la souveraineté populaire – source originelle – réside dans la volonté des citoyens s’exprimant par référendum dans le cadre étatique. Mais dans cette hypothèse, la Constitution fédérale deviendrait un bout de papier, chiffonné au gré de la volonté des Etats et de leurs citoyens ; et les Etat-Unis risquerait de se désagréger fort rapidement. La Supreme Court of Ohio s’est fourvoyée en jugeant que l’Etat était compétent pour soumettre le 18ème Amendement à ratification référendaire sur le fondement de la Constitution fédérée. (« reversed »).

B) De la notion de « concurrent power » (18ème Amendement, Section 2) : State of Rhode Island v. Palmer(1920)                     

La question soulevée devant la Cour suprême n’est pas de peu : elle touche au pouvoir constituant dérivé fédéral, à savoir la compétence octroyée au Congrès pour modifier la Constitution. La décision est rédigée par Justice Van Devanter qui commence par faire lecture de l’article V de la Constitution puis du 18ème Amendement. La Congrès a-t-il respecté l’article V, notamment la formule « whenever two thirds of both Houses shall deem it necessary » ? Le Congrès a-t-il adopté le 18ème Amendement selon les exigences constitutionnelles formelles prescrites ? Quant à la Section 2 du 18èmeAmendement – « The Congress and the several States shall have concurrent power to enforce this article by appropriate legislation » – elle suscite interrogation : que faut-il entendre par « concurrent power » et par « appropriate legislation » ? Bref, quid de la compétence des Etats quand il s’agit de donner effet à une disposition constitutionnelle adoptée par le Congrès ?

Tout d’abord se pose une question de nature procédurale. Selon Van Devanter, le Congrès a respecté les dispositions de l’article V : les deux Chambres – par le vote d’une résolution conjointe – ont chacune adopté, à la majorité des 2/3, le 18ème Amendement. Par cela même, elles ont suffisamment montré que leur proposition « was deemed necessary ». Par la négative, une déclaration expresse est superfétatoire, les Chambres ayant manifesté, sans ambiguïté, leur volonté constituante. D’ailleurs, ajoute la Cour se référant au passé, aucune des résolutions jadis adoptées en vue d’amender la Constitution n’était porteuse d’une déclaration. S’agissant de la majorité des 2/3 requise, se pose la question suivante : faut-il entendre la majorité des présents ou la majorité des membres du Congrès ? Pour la Cour, les 2/3 des votes doivent s’entendre comme ceux des membres effectivement présents. Quant aux dispositions référendaires prévues dans les Constitutions des Etats, elles ne peuvent interférer lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre un Amendement constitutionnel fédéral, qu’il s’agisse d’ailleurs de l’approuver ou de le rejeter (cf. Hawke v. Smith, 1920). En d’autres termes, la Prohibition posée par le 18ème Amendement s’inscrit dans le cadre du pouvoir constituant dérivé fédéral, réservant au Congrès, en vertu de l’article V, la compétence de réviser la Constitution. L’Amendement – régulièrement proposé, approuvé et ratifié – est devenu partie de la Constitution et « must be respected and given effect the same as other provisions of that instrument ». Après la question procédurale, vient le temps, pour la Cour, de jeter son dévolu sur la section 1 et la Section 2 du 18ème Amendement. En vertu de la Section 1, la Prohibition s’applique sur l’entier territoire des Etats-Unis et oblige les corps législatifs, les juridictions, les agents publics, les citoyens. S’en trouvé frappé d’invalidité tout acte législatif – adopté  par le Congrès ou une Législature d’Etat ou une Assemblée territoriale – autorisant ce qui est prohibé par la Section 1. La Cour suprême ne fait ici que rappeler un nécessaire truisme constitutionnel : la Constitution fédérale est la norme suprême, tout amendement constitutionnel fédéral intégrant le corpus constitutionnel devient partie de la norme suprême. Et il revient à tous les organes de l’Etat (y compris d’ailleurs le Congrès en tant qu’entité législative ordinaire non constituante) de respecter cette hiérarchie normative. En vertu de la Section 2, le Congrès et les Etats possèdent un « concurrent power » pour mettre en oeuvre, par une législation appropriée, le 18ème Amendement. Que signifie « concurrent power » ou plutôt que ne signifie pas « concurrent power » ? Cette expression ne signifie pas « joint power », pouvoir partagé entre le Congrès et les Etats. Dissertant sur les pouvoirs du Congrès au regard des pouvoirs des Etats, la Cour achève son propos par une phrase qui se veut rassurante pour les Etats tout en restreignant leur puissance normative. Certes, il existe des « limits beyond which Congress cannot go in treating beverages as within its power of enforcement » ; en l’espèce, le Congrès n’a pas outrepassé ses pouvoirs en adoptant le Volstead Act (titre 1, 2).

Avant même de s’arrêter sur l’opinion dissidente de Justice McKenna, il convient d’évoquer la concurring opinion du Chief Justice White. Car ce dernier critique les carences argumentatives de la Cour, lui reprochant de ne pas avoir suffisamment motivé sa décision (« the court has deemed it proper to state only ultimate conclusions without an exposition of the reasoning by which they have been reached »). Le reproche vaut d’autant que le case soumis à son examen concerne les pouvoirs respectifs de l’Etat fédéral et des Etats fédérés, ainsi que « the welfare of the whole people ». Un tel reproche est repris par Justice McKenna dans sa dissenting opinion. Surtout, ce dernier s’interroge : pourquoi ce silence alors même que sont en jeu les droits des Etats ? La Court peut-elle se contenter d’affirmer que « theVolstead Act is legal legislation and operative throughout the United States », éludant toute question de compétences entre l’Etat et les Etats ? McKenna en vient même à rappeler que les « national States » possèdent des droits et sont des requérants au même titre que l’Etat fédéral et les citoyens. S’il est en accord avec la Section 1 du 18ème Amendement (l’absolue prohibition d’alcool sur le territoire), il souligne que cette Section 1 ne peut se lire (« it does not stand alone ») sans la Section 2 ; cette dernière associe le Congrès et les Etats dans la mise en œuvre de cet interdit. Reste à savoir ce que l’on entend par « concurrent powers ». Là encore, tout est affaire de sémantique interrogative : « What, then, it means by the words « concurrent powers » ? Par ce terme, faut-il entendre action unie et unique ou action séparée et indépendante ? Et que faire en cas de conflit normatif ? De l’expression « concurrent powers », on ne peut – soutient McKenna – déduire la suprématie du Congrès sur les Etats. Ce qu’il est reproché à la Cour est de faire siennes les assertions du Gouvernement fédéral. Or, si le 18ème Amendement énonce, en sa Section 2, que la législation (concrétisant la prohibition d’alcool, Section 1) doit être édictée par « the Congres and the several states », cela signifie égale répartition des pouvoirs. Au-delà de la question technique, organique et fonctionnelle (qui fait quoi ?), McKenna insiste sur un point qui a traversé tout le 19ème siècle : la forme de l’Etat, la forme de gouvernement à l’aune des relations Etat/Etats. Ces derniers ne doivent pas subir le joug normatif de l’Etat fédéral. Cela est d’autant plus impératif – insiste McKenna – que le 18ème Amendement a modifié les habitudes des citoyens, restreint leurs droits,  bouleversé l’économie du pays. Au-delà de l’espèce, est en jeu « the two great divisions of our gouvernemental system », avec ce que cela implique  en termes de droits pour les citoyens et les entreprises. Pour McKenna, la Section 2 commande une « equality of powers » ; il n’existe aucun doute interprétatif, aucun « double sense » mais un « single sense ». Si nous sommes en présence d’un « concurrent power », aucune entité ne peut prétendre à l’exclusivité ; ni le Congrès, ni les Etats. L’existence d’un « dual system of government » ne saurait se traduire par une « alienation of state sovereignty ». McKenna refuse une centralisation politique et normative ; les « concurrent powers » doivent être répartis entre ces deux sources que sont l’Etat fédéral les Etats fédérés. D’autant que le jeu normatif semble faussé : si la législation d’un Etat ne peut pas être moins répressive que celle du Congrès, elle peut être plus répressive. Il existe ici une évidente contradiction selon McKenna : ou la puissance normative du Congrès s’impose en toute circonstance, ou les Etats sont libres quant à l’édiction de leur législation. Mais on ne peut octroyer pleine autonomie législative aux Etats seulement en présence de normes criminelles plus sévères. Cela reviendrait à dire que le droit des Etats prévaut sur le droit du Congrès en présence de lois pénales plus sévères, en fonction de la gravité de la répression. McKenna cite Justice McLean : « A concurrent power excludes the idea of a dependent power ». Procédant par analogie, McKenna ajoute : quand le constituant souhaite poser la suprématie du Congrès, il l’écrit expressément, à l’instar de ce que l’on peut lire dans les 13ème, 14ème et 15ème Amendements. Tel n’est pas le cas, à lire le 18ème Amendement en sa section 2. Dans cette dernière, nous sommes en présence d’une « equality ans community of powers ». Ce que tente de démontrer McKenna – il est optimiste – est que la coexistence de souveraineté peut ne pas générer d’antagonismes ; nous serions en présence de deux parallèles normatives complémentaires, ayant pour finalité de faire respecter les prescriptions de la Section 1. Telle est la philosophie, en quelque sorte, du « self-government » et du « dual system of governement ». C’est la raison pour laquelle il rejette vivement la thèse selon laquelle un « concurrent power » conduirait à la nullification de la Prohibition visée dans le 18èmeAmendement. Pour terminer, mentionnons la position dissidente d’un autre juge, Justice Clarke, qui insiste sur la notion de « constitutional construction ». En une formule acerbe, il appelle ses pairs à ne pas « réécrire la Constitution » au gré de leurs opinions subjectives en sur-interprétant les textes soumis à leur examen : « the scope of the first section cannot constitutionally be enlarged by the language contained in the second section ». Il récuse tout élargissement du champ de la Prohibition posée dans la section 1 par une sur-interprétation des termes de la section 2.

C) De la coopération entre agents fédéraux et non fédéraux (Byars v. US, 1927 ; Gambino v. US, 1927)

Avant même l’adoption du 18ème Amendement, il est posé que le 4ème Amendement s’applique seulement aux recherches conduites par des agents fédéraux (Weeks v. US, 1914). C’est ce que Justice Frankfurter systématise plus tard par la formule « silver platter doctrine » dans son opinion concurrente in Lustig v. US (1949). Durant la Prohibition, en en particulier au mitan des années 20, la Cour suprême fait montre de vigilance – quant à la protection des droits des citoyens sur le fondement du 4ème Amendement – en présence de fouilles conduites et par des « state officials » et par des  agents fédéraux[20]. Dans Byars v. US (1927), la Cour suprême regarde irrégulière la participation d’un agent fédéral à une perquisition réalisée à Des Moines (Iowa) par des « state agents » sur le fondement d’un mandat émanant d’une « state municipal court ». Au regard du 4ème Amendement, le mandat « is bad » écrit le juge et ne passe pas le test de constitutionnalité. Un agent fédéral ne peut entreprendre des fouilles sans mandat fédéral spécifique alors que font défaut les « basis for a federal search and seizure ». Peu importe qu’ultérieurement la saisie soit fructueuse, à savoir la découverte de boissons prohibées par le droit fédéral. En une jolie formule (l’opinion de la Cour est délivrée par Justice Sutherland) : « A search prosecuted in violation of the Constitution is not made lawful by what it brings to light ». Quand une action – a fortiori en matière d’enquête criminelle – manque de fondement en droit et s’avère irrégulière, ce vice originel n’est pas purgé par l’existence d’un fait délictuel. C’est la raison même de l’invention de la procédure, « sœur jumelle de la liberté » (Jellinek). On ne peut tolérer, dit la Cour, que des preuves émergent à charge au détriment d’un citoyen alors même qu’elles ont été découvertes par un agent fédéral dépourvu d’un « lawful warrant ». La Cour souligne combien elle entend demeurer « vigilant » en présence de « méthodes sinueuses et indirectes » peu respectueuses de la Constitution ; il est de son rôle de veiller à la protection des droits fondamentaux,  notamment la sécurité des personnes et le droit de propriété. Ici, l’agent fédéral a été convié – par les agents de l’Etat fédéré – à participer à l’opération de fouilles, en tant que « federal enforcement officer ». C’est en connaissance de cause qu’il a été fait appel à cet agent fédéral ; les objets trouvés ont été considérés comme « things which concerned the federal government alone » ; ces objets ont été remis à l’agent fédéral. Or, ce dernier n’était en rien compétent pour intervenir au titre de son « federal office ». Précision, formulée par la Cour : elle n’entend pas remettre en cause le droit du Gouvernement fédéral de se prévaloir d’objets saisis par des agents d’un Etat ; elle entend écarter ces preuves lorsqu’elles émergent à la suite de la participation illégale d’un agent fédéral à une opération de police locale. Adopter une position jurisprudentielle contraire reviendrait à autoriser les actions illégales des autorités. Et à ceux estimant  inappropriée cette politique jurisprudentielle – au regard de la lutte contre le crime organisé – le juge répond, moraliste : il est des « equivocal methods » qui – bien qu’elles semblent passer le test de constitutionnalité – dégradent la substance même des droits constitutionnels.

Dans Gambino v. US (1927), aucun agent fédéral n’intervient. Nous sommes en présence d’agents de l’Etat de NY arrêtant, à la frontière canadienne, une automobile ; fouillant le véhicule – sans mandat – ils découvrent une « intoxicating liquor ». Les passagers sont poursuivis pour violation du National Prohibition Act. Selon le Gouvernement, l’unique présence d’agents de l’Etat de NY ne pose guère souci juridique : la Section 26 du  National Prohibition Act impose la saisie de toute liqueur transportée illégalement par « any officer of the law ». La Cour rejette un tel argument, estimant que les droits des citoyens – tirés des 4ème et 5ème Amendements – ont été violés. Tout d’abord, les preuves recueillies l’ont été « without probable cause » ; elles sont donc inadmissibles. La principale critique de la Cour repose sur la distinction droit fédéral/droit fédéré : les « state troopers » ne pouvaient pas intervenir – au nom des Etats-Unis, pour faire respecter le droit fédéral – sauf s’ils portaient assistance à une opération fédérale. Tel n’est pas le cas ; aucun agent fédéral n’était présent et à aucun moment les « state troopers » évoquent une quelconque collaboration avec des agents fédéraux. Certes, le National Prohibition Act prévoit une coopération entre les Etats et le gouvernement fédéral ; certes, des magistrats d’Etat sont autorisés, aux frais des Etats-Unis, à emprisonner des « lawbreakers » du droit fédéral ; certes, des magistrats d’Etat  peuvent émettre des mandats en vertu de « federal statutes » ; certes, les agents de l’Etat de NY pensaient agir en vertu des prescriptions du droit fédéral pour faire respecter ce dernier. Reste que l’absence d’un agent fédéral vicie l’entière procédure ; s’en trouvent violés les droits garantis par les 4ème et 5ème Amendements. La Cour suprême – anticipant les critiques – prend soin de préciser que la décision qu’elle rend dans Gambino v. US n’est pas en contradiction avec différentes décisions antérieures (Weeks v. US, 1915 ; Dodge v. US, 1926 ; Burdeau v. McDowell, 1921). Dans ces affaires, des preuves recueillies par des personnes autres que des agents fédéraux ont bien été jugées admissibles dans des poursuites de niveau fédéral ; mais dans aucune de ces affaires, les fouilles et saisies ont été réalisées « solely » dans le but d’aider les autorités fédérales. Un mot, « solely » : la Cour suprême refuse de prendre en compte les preuves saisies par les agents fédérés car ils ont conduit leurs recherches « solely » pour le compte du gouvernement fédéral. Cela n’est pas de leur compétence (1er grief, formel) ; cela emporte violation des droits des requérants (2ème grief, substantiel). Les preuves ainsi obtenues par les agents de l’Etat de NY ont été utilisées en violation des droits constitutionnels des citoyens.

***

Le 21ème Amendement[21], ratifié en 1933, abroge le 18ème Amendement. Dès 1934 (US v. Chambers), la Cour suprême prend acte de l’adoption du 21ème Amendement ; elle met fin aux procédure judiciaires pendantes fondées sur la violation du 18ème Amendement et du Volstead Act.

Attardons nous, en guise de conclusion, sur deux personnalités hors du commun qui – malheureusement – ne se sont jamais rencontrées car n’habitant pas le même siècle : Willebrandt et Spooner. La première est l’assistante de l’US Attorney General de 1921 à 1929, en charge de requérir contre les personnes présumées avoir violé le 18ème Amendement et le Volstead Act. La seconde est un juriste anarchiste plaisant la cause des boissons alcoolisées au nom d’une conception libertarienne de l’existence.

Willebrandt (1889-1963), bien qu’opposée à titre personnel à la Prohibition, fit montre d’une  implacable volonté dans l’application stricte de la loi, au point d’être qualifiée de : Firts Lady of Law, Deborah of the Drys, Mrs FirebrandProhibition Portia. Dans son The Inside of Prohibition (1929), elle narre cette époque. Incarnation juridique de la Prohibition, elle révoque les procureurs jugés par trop timorés dans leur application du Volstead Act. Dans le Chapitre 15 de cet ouvrage, elle s’intéresse à l’affaire Olmstead (1928). Elle écrit cette célèbre phrase qui n’est pas loin de résumer, en quelques lignes, le temps juridique de la Prohibition : « Although personaly I would still use my influence to prevent the policy of wine taping adopted as a prohibition enforcement measure, I nevertheless recognize that the interpretation of the United State Constitution against the lawbreaker and in favour of the government’s rights to catch him is a prohibition victory of nosmall proportion »[22]. Willebrandt soumet près de 300 certiorari à la Cour suprême en relation avec le 18ème Amendement ; elle vient en personne – dans une quarantaine de cases – défendre l’application de la loi fédérale devant les juges. Elle joue un rôle politique notable ; en 1928, elle fait campagne en faveur de Hoover, républicain Dry. Elle démissionne l’année suivante. Selon une formule masculine et uchroniste que l’on prête à Justice Sirica, Willebrandt serait devenue présidente des Etats-Unis « si elle avait porté des pantalons »…

Spooner (1808-1887)[23] est un ardent défenseur de la cause Wet. Son œuvre parcourt le siècle, un siècle empli des revendications des ligues de tempérance, ardemment par lui combattues. Sa thèse ? La vente et la consommation d’alcool ne peuvent être prohibées dans un Etat respectueux des droits des citoyens[24] : la liberté n’est-elle pas le principe et la restriction l’exception ? Tel est le principe matriciel de la pensée libérale, politique et économique. Sans doute lecteur de Mandeville (The Fable of the Bees : or, Private Vices, Public Benefits ,1714), Spooner estime qu’il « n’est pas vrai que les vices privés d’un homme sont, dans un sens légal, des nuisances pour un autre homme, ou pour le public »[25]. Spooner revendique même un  droit à « l’auto-destruction »[26] ; on ne saurait confondre crimes et vices. Ces derniers, quand bien même ils seraient affreux (alcoolisme, jeu…), ne relèvent pas de la loi pénale ; ils sont vices, non crimes. De la normalité régulée par la norme : tel est l’enjeu. Ce que tente de détruire – par le verbe – Spooner est ce monde bourgeois confessionnel qu’il exècre. Il se veut un un pragmatique : crimes et délits, en leur immense majorité, sont-ils le fruit de l’alcool ? Non. Aimant la provocation teintée d’ironie, il ajoute même que « Les cambrioleurs, voleurs, détrousseurs, faussaires, faux-monnayeurs, et escrocs qui s’attaquent à la société, sont tout sauf des buveurs invétérés »[27]. Bref, la loi est violée le plus souvent par des gens sobres…

[1] 18ème Amendement :

« Section 1. After one year from the ratification of this article the manufacture, sale, or transportation of intoxicating liquors within, the importation thereof into, or the exportation thereof from the United States and all the territory subject to the jurisdiction thereof for beverage purposes is hereby prohibited.

Section 2. The Congress and the several States shall have concurrent power to enforce this article by appropriate legislation.

Section 3. This article shall be inoperative unless it shall have been ratified as an amendment to the Constitution by the legislatures of the several States, as provided in the Constitution, within seven years from the date of the submission hereof to the States by the Congress ».

[2]Les résolutions de la Chambre des représentants et du Sénat datent de décembre 1917.

[3]Le Jones Act de 1929 (« Increased Penalties Act ») durcit les sanctions en cas de violation de la Prohibition (il est aboli en 1935). Il avait néanmoins le mérite d’opérer une distinction entre « casual offenders » et « conspiracy ».

[4]Dillon v. Gloss (1921), Williams v. US (1921), Leser v. Garnett (1922), Heiltler v. US (1923).

[5]Le 18ème Amendement et le Volstead Act – interprétés par la Cour – deviennent y compris des normes permettant de revisiter le droit international bilatéral. Nonobstant un traité conclu avec la Grande-Bretagne, le transport d’alcool est prohibé sur le territoire américain ; de l’alcool provenant du Canada ne peut transiter par les Etats-Unis pour aller ensuite vers un pays 1/3. Grogan v. Hiram Walker & Sons, Ltd. (1922).

[6]US v. Lanza (1922), Brede v. Powers (1923), Cunard S.S. Co. v. Mellon (1923), Druggan v. Anderson (1925), Samuels v. McCurdy (1925), US v. Valante (1924).

[7] R. Post, Federalism, Positive Law, and the Emergence of the American Administrative State : Prohibition in the Taft Court Area, William & Mary Law Review, Vol. 48, Issue 1, article 2, 2006, p.6, www.scholarship.law.wm.edu.

[8]Cf. le titre de son article :  R. Post, Federalism, Positive Law, and the Emergence of the American Administrative State : Prohibition in the Taft Court Area, William & Mary Law Review, Vol. 48, Issue 1, article 2, 2006.

[9] R. Post, Federalism, Positive Law, and the Emergence of the American Administrative State : Prohibition in the Taft Court Area, William & Mary Law Review, Vol. 48, Issue 1, article 2, 2006, p.7, www.scholarship.law.wm.edu.

[10] 5ème Amendement :

« No person shall be held to answer for a capital, or otherwise infamous crime, unless on a presentment or indictment of a grand jury, except in cases arising in the land or naval forces, or in the militia, when in actual service in time of war or public danger; nor shall any person be subject for the same offense to be twice put in jeopardy of life or limb; nor shall be compelled in any criminal case to be a witness against himself, nor be deprived of life, liberty, or property, without due process of law; nor shall private property be taken for public use, without just compensation ».

[11]B. I. Bittker, Taxing Income from Unlawful Activities, Yale Law School Legal Scholarship Repository, Faculty Scholarship Series, 1974, p.134, https://digitalcommons.law.yale.edu/fss_papers/2289/.

[12]B. I. Bittker, Taxing Income from Unlawful Activities, Yale Law School Legal Scholarship Repository, Faculty Scholarship Series, 1974, p.131, https://digitalcommons.law.yale.edu/fss_papers/2289/.

[13]Le droit étant – comme l’histoire, cf. Marx – une tragédie et une farce, précisons que Manton est ultérieurement accusé d’avoir perçu des pots-de-vin… imposés par l’administration fiscale. B. I. Bittker, Taxing Income from Unlawful Activities, Yale Law School Legal Scholarship Repository, Faculty Scholarship Series, 1974, p.144, https://digitalcommons.law.yale.edu/fss_papers/2289/.

[14]B. I. Bittker, Taxing Income from Unlawful Activities, Yale Law School Legal Scholarship Repository, Faculty Scholarship Series, 1974, p.145, https://digitalcommons.law.yale.edu/fss_papers/2289/.

[15]En 1961 (James v. US), la Cour suprême opère une subtile distinction : il est possible de déduire des revenus illégaux tirés d’une activité légale (loyers, salaires) ; il est impossible de déduire des revenus illégaux d’une activité illégale.

[16] 4ème Amendement :

« The right of the people to be secure in their persons, houses, papers, and effects, against unreasonable searches and seizures, shall not be violated, and no Warrants shall issue, but upon probable cause, supported by Oath or affirmation, and particularly describing the place to be searched, and the persons or things to be seized ».

Serait encore violé le 5ème Amendement (« nor shall be compelled in any criminal case to be a witness against himself ») : la retranscription des conversations porterait atteinte au droit de ne pas s’incriminer soi-même.

[17]Selon D. Kyving, le Olmstead case est la décision la plus importante de la Cour suprême en matière de respect de la Prohibition.  D. Kyving, Repealing National Prohibition, University of Chicago Press, 1979, p.34.

[18]K. M. Murchisson, Prohibition and the Fourth Amendment : a New Look at Some Old Cases, The Journal of Criminal Law & Criminology, vol. 73, n°2, 1982, p.488, https://pdfs.semanticscholar.org/dc87/798af0cfe6af6cbf99286f5d1597f9932742.pdf.

[19]Article V C :

« The Congress, whenever two thirds of both Houses shall deem it necessary, shall propose Amendments to this Constitution, or, on the Application of the Legislatures of two thirds of the several States, shall call a Convention for proposing Amendments, which, in either Case, shall be valid to all Intents and Purposes, as part of this Constitution, when ratified by the Legislatures of three fourths of the several States, or by Conventions in three fourths thereof, as the one or the other Mode of Ratification may be proposed by the Congress; Provided that no Amendment which may be made prior to the Year One thousand eight hundred and eight shall in any Manner affect the first and fourth Clauses in the Ninth Section of the first Article; and that no State, without its Consent, shall be deprived of it’s equal Suffrage in the Senate ».

[20]K. M. Murchisson, Prohibition and the Fourth Amendment : a New Look at Some Old Cases, The Journal of Criminal Law & Criminology, vol. 73, n°2, 1982, p.502.

[21] 21ème Amendement :

Section 1. The eighteenth article of amendment to the Constitution of the United States is hereby repealed.

Section 2. The transportation or importation into any State, Territory, or possession of the United States for delivery or use therein of intoxicating liquors, in violation of the laws thereof, is hereby prohibited

Section 3. This article shall be inoperative unless it shall have been ratified as an amendment to the Constitution by conventions in the several States, as provided in the Constitution, within seven years from the date of the submission hereof to the States by the Congress.

[22]M. W. Willebrandt, The Inside of Prohibition (1929), cité in NY Times, 19 août 1929, https://www.nytimes.com/1929/08/18/archives/the-inside-of-prohibition-in-this-article-mrs-willebrandt-describes.html.

[23]L. Spooner, Vices are not crimes. A vindication Of Moral Liberty » (1875), traduit par « Les vices ne sont pas des crimes », Les Belles Lettres, Iconoclastes-17, 1993.

[24] Les développements suivants sont issus d’un article à paraître :

F. Laffaille, L’anarchisme constitutionnel de Lysander Spooner (3). Vices are not crimes, in DP-RRJ (Droit prospectif-Revue de la recherche juridique).

Dans la même revue, deux autres articles à paraître sur Spooner :

L’anarchisme constitutionnel de Lysander Spooner (1). « The Constitution of no Authority,

L’anarchisme constitutionnel de Lysander Spooner (2). « Natural Law : or the Science of Justice.

[25]L. Spooner, Les vices ne sont pas des crimes, Les Belles Lettres, Iconoclastes-17, 1993, p.51.

[26]L. Spooner, Les vices ne sont pas des crimes, Les Belles Lettres, Iconoclastes-17, 1993, p.44.

[27]L. Spooner, Les vices ne sont pas des crimes, Les Belles Lettres, Iconoclastes-17, 1993, p.64.

Cet article est également disponible en Anglais

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