(résumé)
La France a une longue histoire avec l’alcool, notamment avec le vin qui est considéré comme la boisson nationale depuis des siècles. Il est perçu comme un des vecteurs et des signes de l’unité de la nation. Jusqu’au début des années 1870, le vin est le produit leader en France ; il ne souffre d’aucune concurrence. L’avènement d’un puceron, le phylloxera, durant les années 1860 ravage le vignoble français et oblige les viticulteurs à procéder à l’arrachage de leurs vignes. Cette crise fait chuter la production du vin en France durant une vingtaine d’années (le temps de reconstituer le vignoble à travers de nouveaux plants) qui profite aux alcools non fermentés avec à leurs têtes, la liqueur d’absinthe. C’est le début d’une confrontation entre les alcools fermentés représentés par le vin et les alcools non fermentés qui va durer jusqu’au début des années 1940. Cette lutte est marquée par une première victoire des partisans du vin en 1915 avec l’interdiction de la fée verte, l’absinthe. Paradoxalement, cette interdiction libère le marché des alcools de bouche et favorise l’émergence d’une diversité de boissons alcoolisées durant la période de l’entre-deux-guerres. Cette lutte acharnée est arbitrée par les pouvoirs publics sous l’influence des lobbies antialcooliques et viticole.
(texte intégral)
La France a une longue histoire avec l’alcool, notamment avec le vin considéré comme la boisson nationale depuis des siècles. Boire du vin c’est s’identifier à la France. Il est l’un des vecteurs et des signes de l’unité de la nation. Cette idée est présente dans l’imagerie populaire comme le montre l’estampe représentant Louis XVI debout, coiffé du bonnet phrygien orné de la cocarde tricolore, buvant à la bouteille les paroles « Vive la Nation », disposées de manière à figurer un liquide représentant le vin (Fig. 1). Les eaux-de-vie ne sont pas en reste, elles sont, culturellement, rattachées aux territoires qui les ont vu naître et se développer. Elles symbolisent l’immortalité, le bien-être et le remède contre les maux physiques et moraux (Fig. 2).
Que ce soit en apéritif, en accompagnement d’un repas, en digestif ou en « arrosant » un évènement heureux, les boissons alcoolisées sont d’abord des symboles de partage, d’accueil et de politesse. Il n’y a pas de meilleure façon de témoigner à quelqu’un sa reconnaissance ou son estime que de lui offrir à boire. Paradoxalement, le code de la politesse perd tout son sens si la boisson offerte est dépourvue d’alcool. Le refus d’offrir une boisson alcoolisée est considéré dans la culture française comme une offense ou, au moins, comme une preuve de mauvaise éducation (Aurrières, 1955, p. 129). De même, refuser de « trinquer » est une véritable impolitesse.
La consommation d’alcool n’est pas uniquement un symbole de partage et de politesse avec leurs contraintes, elle est aussi un rite de passage vers l’état d’adulte, un symbole de virilité et un moyen d’évasion. À la fin du XIXesiècle et au début du XXe, la consommation d’alcool est perçue comme un comportement familier et « naturel » chez les hommes. C’est un rite de passage obligatoire vers la vie d’adulte (Beck et al, 2006) qui commence par apprendre à boire, et par la suite, à boire beaucoup sans paraitre incommodé. Par cette attitude, le jeune buveur manifeste une supériorité indiscutable (Aurrières, 1955, p. 128). Ainsi, les expressions si répandues du genre « boire comme un grand », « boire comme un homme » sont de nature à faire éprouver aux jeunes qui ne boivent pas, un véritable complexe d’infériorité (Malignac et Colin, 1954).
L’alcool est perçu aussi comme un symbole de virilité au sein du cercle familial mais aussi dans le monde du travail. De très nombreuses personnes durant la deuxième moitié du XIXe siècle et durant la première moitié du XXe croient que l’alcool est nécessaire au travail. Elles adhèrent à l’idée qu’elles supporteraient facilement de grandes quantités d’alcool sous forme de boissons fermentées ou distillées car « l’alcool contenu dans ces boissons est facilement brulé au moment des efforts, surtout si ceux-ci sont accomplis au grand air » (Aurrières, 1955, p. 130-131). La consommation d’alcool fonctionne, depuis le XIXe siècle au moins, comme « un marqueur d’une virilité ouvrière que les stéréotypes valident […] tous les discours sur la dépense physique nécessaire au travail ouvrier participent à la ratification d’une virilité ouvrière » (Vigna, 2016).
Enfin, l’alcool devient un moyen pour combler le besoin d’évasion des ouvriers à cause du travail pénible qui ne trouve aucune compensation en dehors de celui-ci, du fait des conditions de vie sordide qui sont les leurs (Debré et Sauvy, 1955, p. 126). Contrairement à l’opinion reçue de l’époque, la fréquentation des débits de boissons n’est pas uniquement l’occasion de « se griser » (Levret, 1895)[1] mais aussi de se délasser, s’amuser et parfois se politiser. La dégradation de la vie sociale des ouvriers favorise la fréquentation des débits de boissons. Comme l’écrit Charles Gide dès 1903 : « Le débit exerce une suggestion permanente. Elle a d’autant plus de prise sur l’ouvrier qu’elle le guette à toute heure, à l’entrée et à la sortie de l’atelier, au petit jour et au saut du lit quand il frissonne de froid, à la tombée de la nuit quand il rentre las […] dans la soirée pour lui offrir en échange du taudis où la femme fait le ménage et où la marmaille raille, une salle, où il se sent revivre » (Gide, 1904).
Si l’alcool représente un vecteur de sociabilisation qui intègre le risque d’une éventuelle transformation de l’alcoolisation en alcoolisme, il n’empêche qu’il véhicule depuis longtemps des vertus médicinales et apéritives que les producteurs et les distributeurs n’hésitent pas à afficher pour attirer et fidéliser les consommateurs. Ainsi, les eaux-de-vie, comme le vin, se présentent comme un signe de culture spécifique à chaque région française dont les bienfaits sur la santé sont mis en avant depuis des siècles avec une accentuation de ce message durant le XIXe siècle et ce, jusqu’à la perte de la guerre contre les prusses en 1870 et plus tard, avec l’instauration du régime de Vichy et sa politique de lutte antialcoolique.
La consommation d’alcool en France est culturellement, mais aussi historiquement, ancrée dans les habitudes sociales et familiales. Chaque région cultive son cru et sa spécialité en vantant les vertus médicinales et apéritives[2] à travers les bienfaits des herbes et des plantes qui composent leurs recettes comme la Chartreuse dans le Dauphiné et le Vivarais qui est présentée comme un « élixir de longue vie [3]», le génépi dans le Jura, dans les hautes montagnes, aux vertus médicinales qui ont fait la renommée des Basses et des Hautes-Alpes (Topalov, 1890, p. 70 ; Delcour, 2004, p. 24 ; Bëtsch et Cortot, 2004, p. 165), la bénédictine, une liqueur qui se présente en tant qu’élixir inventé au XVIe siècle[4] ou le Cap Corse en Corse qui permet de « faire tomber la fièvre » (Girard et de Meurville, 1990, p. 109) . La majorité des boissons alcoolisées proposées sur le marché national (issues de la fermentation et/ou de la distillation) se présentent au consommateur avec des vertus médicinales et/ou apéritives : « élixir de longue vie », « fait tomber la fièvre », « fortifiant », « tonique », « tonifiant », « régénérateur », « ouvre l’appétit », « apéritif », « digestif », « reconstituant »…
Selon un manuel général d’instruction primaire datant de 1899 cité par Philippe Gaillard dans son ouvrage Les cafés en Savoie 1815-1939, l’alcool « ouvre l’appétit, endort la faim, favorise la digestion, donne de la force […], éveille l’intelligence, excite la gaité, tue le ver et chasse le mauvais œil en cas d’épidémie » (Gaillard, 1989, p. 148). Ces vertus médicinales anciennes deviennent des slogans commerciaux durant la deuxième moitié du XIXe siècle et qui s’accentuent jusqu’en 1942, année de l’interdiction des apéritifs et de leur publicité. C’est le cas par exemple, du vin de Vial, commercialisé dans les pharmacies (Fig. 3), de l’absinthe Cusenier « c’est ma santé » (Fig. 4), de la Bénédictine DOM DOM « exquise, tonique et digestive » (Fig. 5), de la Suze « l’amie de l’estomac » (Fig. 6), de la Bressonide[5], une héritière de l’absinthe, l’une des plus anciennes liqueurs anisées répertoriée dans l’Est de la France créée durant les années 1870 par la maison Bresson à Fougerolles pour anticiper l’éventuelle interdiction de l’absinthe « extrait de plantes apéritives stomachiques et calmantes ne renfermant aucun des principes hilarants reprochés à l’absinthe » (Fig. 7) ou encore, de la Bressiane, « un apéritif qui donne la santé […] mélange nouveau de pamplemousse et gentiane, qui éveille l’appétit et prépare la digestion[6] » (Fig. 8).
Bien qu’elles accompagnent les boissons alcoolisées jusqu’à la promulgation de la loi du 23 août 1940[7], ces vertus médicinales et apéritives se confrontent à une dénonciation des « mauvais alcools» qui stigmatisent les boissons issues de la distillation au profit de celles issues de la fermentation. Cette stigmatisation est favorisée par trois événements majeurs : la crise viticole causée par le phylloxera, la perte de la guerre franco-allemande de 1870 et les puissants lobbies antialcooliques.
- (1870-1921)
Jusqu’au début des années 1870, le vin est le produit leader sur le marché des alcools de bouche. Il ne souffre d’aucune concurrence notable mais, avec l’avènement du phylloxera, un puceron qui ravage le vignoble français dès la fin des années 1860, les viticulteurs sont obligés de procéder à l’arrachage de leurs vignes. Ce ravage cause la baisse de la production nationale de vin durant une vingtaine d’années (le temps de reconstituer le vignoble à travers de nouveaux plants importés des États-Unis) qui va profiter à d’autres types d’alcools comme l’alcool industriel issu de la distillation des betteraves, les eaux de vie dont le kirsch de Fougerolles et la liqueur d’absinthe.
Cette crise viticole provoque un déplacement de la consommation vers les alcools forts. L’augmentation assez générale du niveau de vie, la croissance du nombre des débits de boissons (+ 32 % entre 1869 et 1913), et celle des bouilleurs de cru (+ 1 078 % entre les deux mêmes dates)[8], favorisées par une législation libérale, l’impact d’une publicité omniprésente et alléchante, attirent vers les eaux-de-vie, et surtout les apéritifs, une nouvelle clientèle. Le maximum historique de la consommation se place précisément en 1900 avec 4,6 litres d’alcool pur par habitant. Cette même année, il s’est bu 238 000 hectolitres d’absinthe (0,62 1/habitant) contre 18 000 hectolitres (0,049 1/habitant) en 1880 (Jacquet, 1912, p. 734).
À cette situation s’ajoute la guerre de 1870 qui ébranle la fierté française et attribue cette défaite à l’ivrognerie (Gaillard, 1989, p. 164) et en particulier à l’alcool distillé dit « non hygiénique », c’est le cas des alcools industriels mais aussi des eaux-de-vie et de la liqueur d’absinthe. En effet, en condamnant l’alcool distillé rendu responsable de l’image d’une France décadente, on crée, volontairement, une confusion dans l’imaginaire social entre les alcools issus de la distillation des betteraves, des mélasses, des grains ou des pommes de terre et les eaux de vie rattachées à des terroirs et à des histoires locales ancestrales. Le message est explicite : en dehors des boissons issues du procédé de fermentation, toutes les autres sont considérées comme mauvaises et nuisibles pour le consommateur et pour la société.
Au lendemain de la guerre de 1870, les premières ligues antialcooliques voient le jour au niveau associatif et politique. Ces ligues vont lutter contre les alcools distillés dits « non hygiéniques » responsables du « péril alcoolique » tout en faisant, directement ou indirectement, la promotion du vin comme en 1907 où le quotidien Le matin, soutien des viticulteurs et des ligues antialcooliques[9], organise une grande manifestation publique au Trocadéro, réunissant près de 4 000 personnes, dont des personnalités scientifiques et politiques avec un slogan : « Tous pour le vin, contre l’absinthe[10] ».
Ces associations antialcooliques utilisent la théorie de la dégénérescence, dont l’un des fondateurs est le Docteur Legrain (1889)[11], comme une cause du péril social, et demande que ce fléau soit traité en tant que cause nationale, mettant en avant le danger qu’il représente pour la « race française qui décroît » (Fissartier, 1861, p. 42) et surtout pour les classes populaires. Dans ce même sens, Bertrand Dargelos, citant l’historienne américaine Susanna Barrows (1979, p. 205-218), précise qu’ « il existe un sentiment de faiblesse de la « race » française par rapport aux autres nations européennes qui est redoublé par la vision d’insécurité et de dangerosité que représentent les classes populaires depuis la défaite de 1870 et les événements de la Commune de Paris de 1871 » (Dargelos, 2005) .
Les élites et les ligues antialcooliques présentent le « bon alcool » comme étant français. Il est envié et même volé par l’étranger, fournisseur du mauvais alcool. En 1882, deux auteurs mosellans, sous le pseudonyme collectif « Erckmann-Chatrian », écrivent : « Ils (les Prussiens) ont de l’argent, eux, sans rien faire ils s’enrichissent, ils enlèvent notre bois, notre vin, ils nous accablent tous les jours de nouveaux impôts et ne nous envoient que leur Spritz, leur eau-de-vie terrible, leur poison ! dont les ouvriers de fabriques meurent comme des mouches » (Erckmann-Chatrian, 1882, p. 93).
En stigmatisant l’eau-de-vie allemande, on crée une confusion dans l’imaginaire du consommateur français tenté de considérer tous les alcools distillés comme alcools industriels et par conséquent, mauvais. Ce message véhiculé au lendemain de la guerre de 1870 dure jusqu’au début de la première guerre mondiale. En effet, sur une affiche de propagande titrée « L’ALARME[12] », datant de 1914, éditée par la Société française contre l’alcoolisme et dont le Président d’honneur n’est autre que Mr. Raymond Poincaré, nous lisons : « L’alcool est votre ennemi aussi redouté que l’Allemagne… Il a coûté à la France depuis 1870, en hommes et en argent, bien plus que la guerre actuelle. L’alcool flatte le palais ; mais, véritable poison, il détruit l’organisme […] À l’instar du Kaiser criminel, l’alcoolisme décime et ruine la France, à la plus grande joie de l’Allemagne ». La subtilité du message véhiculé par cette affiche réside dans le fait qu’elle n’évoque pas directement les eaux-de-vie tels que le kirsch et le cognac et par conséquent, incite, indirectement, le consommateur à les classer parmi les alcools industriels mauvais.
Quelques années auparavant, en 1895, Raymond Poincaré, alors ministre de l’Instruction publique, autorise l’enseignement à l’école des dangers de l’alcool du point de vue de l’hygiène, de la morale, de l’économie sociale et politique. Des médecins viennent sensibiliser les instituteurs et mettent à leur disposition du matériel antialcoolique comme les affiches, les tableaux muraux, les buvards, etc (Fig. 9). Il est bien clair, que l’accent est mis sur la distinction entre les bienfaits des boissons fermentées (vin, cidre, poiré et bière) et les méfaits de toutes les boissons distillées avec à leur tête les alcools de betterave, de pomme de terre et de grain. En vantant les vertus des boissons fermentées, les alcools issus du procédé de distillation comme les eaux-de-vie sont stigmatisés. Les quelquefois où les eaux-de-vie sont évoquées, elles sont associées à la liqueur d’absinthe considérée comme étant « une boisson malheureusement nationale et bien française » (Delahaye, 1988, p. 475-489)[13] (Fig. 10) qui donne la mort (Fig. 11). En1906, « La France boit plus d’absinthe à elle seule que le reste du monde entier » (Griveau, 1906, p. 37).
Devant ce constat, l’inquiétude du monde de la viticulture grandit et pousse les élus nationaux à voter une loi prohibant cet alcool très encombrant. Des académiciens se mêlent à la bataille comme Jules Clarette qui déclare : « Faisons que les marchands de vin qui ont bien le droit de vivre, vendent du vin, du vin français, du vin naturel et sain, celui que le roi gascon faisait couler sur les lèvres de son nouveau-né. Alors, ils auront bien mérité de la France[14]. »
Néanmoins, toutes les propositions de lois tendant à supprimer l’absinthe furent rejetées jusqu’au lendemain de la déclaration de la guerre de 1914. Le gouvernement demande aux préfets de prendre des arrêtés interdisant la vente de l’absinthe dans les débits de boissons. Cette disposition montrant ses limites, le gouvernement décide d’accentuer sa lutte contre l’absinthe en publiant, le 7 janvier 1915, un décret interdisant la vente en gros et en détail ainsi que la circulation de l’absinthe et des liqueurs anisées. Le 16 mars 1915, le décret se transforme en loi d’interdiction de la fabrication, de la vente en gros et au détail, ainsi que de la circulation de l’absinthe et des liqueurs similaires.
L’interdiction de l’absinthe en 1915 sonne le début d’une politique antialcoolique qui va durer jusqu’à la fin de la Grande Guerre et qui, paradoxalement, va favoriser les boissons issues de la fermentation avec à leur tête, le vin. En 1916, pour les besoins de la guerre et pour lutter contre l’alcoolisme des alcools distillés en général et des différentes liqueurs utilisant l’alcool d’industrie, l’État instaure, par la loi du 30 juin, un monopole sur les alcools industriels provenant de la distillation des betteraves, des mélasses et des grains et supprime, par extinction, le privilège des bouilleurs de cru avec l’institution d’une franchise de 10 litres d’alcool pur distillé et augmente les droits de consommation sur l’alcool (de 220 à 400 francs).
La position favorable et partisane de l’État sur le vin, justifie le vote de la loi du 6 mars 1917 interdisant l’introduction et la distribution sur les lieux de travail de toutes les boissons alcoolisées. Mais, étrangement, le vin, la bière, le cidre, le poiré et l’hydromel non additionnés d’alcool ne sont pas interdits.
Débarrassés de l’absinthe, les producteurs disposent désormais d’une belle occasion pour attirer de nouveaux consommateurs en leur proposant un panel d’apéritifs riche et diversifié. La France de l’entre-deux-guerres apparait comme le royaume de l’apéritif et du marketing des marques où on comptabilise plus de 1500 apéritifs (Howard, 2006, p. 45) différents mis sur le marché des alcools de bouche.
Après la Grande Guerre, le discours évolue avec un marché des alcools de bouche libéré du poids de l’absinthe interdite en 1915. Le principal souci de l’État est économique. Le gouvernement décide alors, par décret-loi datant 3 septembre 1918, d’augmenter les droits de consommation (600 francs) et les prix des licences des débits, et de créer une nouvelle taxe sur les spiritueux.
En 1920, de nouveau, l’État procède à une augmentation des droits de consommation (1 000 francs) et à la prorogation du monopole des alcools dont le but est la poursuite de l’éviction de l’alcool industriel du marché et sa seule utilisation désormais comme carburant. Néanmoins, il décide, deux années plus tard, de relancer le marché des alcools de bouche en autorisant, par la loi du 17 juillet 1922, la fabrication et la commercialisation des liqueurs similaires à l’absinthe à base d’anis, titrant moins de 40°. Tous les alcools distillés sont issus désormais du vin, y compris celui qui entre dans le procédé de fabrication des apéritifs. Il parait alors difficile de les condamner. Cette situation favorise la quasi-disparition du lobby parlementaire antialcoolique et entraine la suppression de la subvention accordée par l’Etat à la Ligue nationale entre 1922 et 1928, laquelle s’élevait à 20 000 francs[15].
Dans cette même logique, le privilège des bouilleurs de cru est rétabli par palier pour fixer finalement le montant de l’allocation en franchise à 10 litres d’alcool pur par bouilleur de cru grâce notamment à la loi du 28 février 1923, et un an plus tard, soit le 1er août 1924, un soutien supplémentaire aux viticulteurs est acté par une loi qui confirme les « accords de Béziers » du 8 avril 1922 qui favorisent le développement de la production d’alcool au détriment de celle du sucre. Les viticulteurs trouvent alors des débouchés à leurs excédents de vin et de cidre dans la distillation. Le vin et ses dérivés peuvent alors côtoyer les alcools distillés et/ou macérés. Cette loi distingue pour la première fois les alcools naturels des alcools industriels. Viticulteurs et distillateurs industriels ont ainsi chacun un débouché pour leurs productions respectives. Ce statut de l’alcool se consolide en deux temps : par la signature des accords de Béziers en 1922 et par la loi du 1er août 1924 qui donne une base permanente au système.
Tout en favorisant l’émergence et la multiplication des liqueurs avec des taux alcooliques élevés qui vont même atteindre 45° en 1938, l’État décide de soutenir la filière viticole pour remédier à la surproduction de vin en créant par la loi du 4 juillet 1931 un Comité national de propagande en faveur du vin. L’objectif étant de promouvoir une augmentation de la consommation de vin français sur tout le territoire tout en se prévalant de la lutte antialcoolique comme l’explicite la circulaire de Marius Roustan prescrivant l’enseignement du vin à l’école :
Le vin, produit de la vigne, fait partie du patrimoine culturel et gastronomique protégé en France. […] La propagande en faveur du vin […] est non seulement organisée, mais encouragée par le gouvernement. […] Les vins de France […] sont, à la fois, une des sources de richesses les plus admirables de notre terre généreuse, mais aussi une de nos gloires les plus incontestées. Il y aurait donc quelque chose de contradictoire, d’inadmissible dans le fait que ceux qui ont la charge de l’éducation nationale, ou bien s’opposeraient à cette action concertée en vue de l’intérêt général, ou bien resteraient indifférents aux appels qui leur seraient adressés pour y concourir. Je trouverais pour ma par fâcheux que l’on condamne comme livre de dictées et de lectures le recueil de morceaux choisis fort intéressants publié sous le titre « Le Vin ».Contre l’alcoolisme destructeur vos efforts ne seront jamais assez énergiques : la défense du vin fait partie de cette lutte indispensable[16].
La propagande en faveur de la boisson nationale, le vin, est accompagnée, tout de même, d’une politique malthusienne en interdisant les plantations nouvelles, en limitant l’irrigation des vignes et en développant la distillation. Cette loi institue aussi des primes à l’arrachage. A la faveur de cette surproduction viticole, l’alliance entre les viticulteurs et les mouvements antialcooliques se reconstruit en ciblant la consommation des apéritifs en général tout en épargnant la boisson nationale, le vin. Pour se démarquer des boissons apéritives considérées comme responsable de l’alcoolisme mondain[17], les pouvoirs publics soutiennent la filière viticole en associant l’image du vin à la santé et au patriotisme endéveloppant des stratégies de communication à travers des techniques modernes de publicité commerciale (Fig. 12) faisant oublier la surproduction, qui est la raison principale de la crise viticole comme le soulève De Closets dans son ouvrage La France et ses mensonges : « Lorsque éclatent les grandes crises viticoles, nul n’a le courage de dire que le vrai problème est d’arracher le tiers du vignoble français […] mais non, le problème paraît toujours venir de ce que les Français sont des mauvais citoyens qui se dérobent au devoir national de boire le produit de leurs vignes. » (De Closets, 2006, p.196)
L’augmentation de la consommation des alcools en général et du vin en particulier durant les années 1930 fait craindre un alcoolisme pesant sur la nation comme ce fut le cas de la période antérieure à l’interdiction de l’absinthe. À cela s’ajoutent les conséquences de la crise de 1929, la baisse démographique, la dénonciation de l’industrialisation qui ne se soucie pas de la santé des ouvriers (Céline, 1977, p. 130), du capitalisme et de l’individualisme représentés par le taylorisme et le fordisme. Ce sont tous ces facteurs qui sont érigés comme responsables d’une certaine décadence dénoncée par des intellectuels français dont les plus actifs sont Louis-Ferdinand Destouches connu sous le nom de Louis-Ferdinand Céline et Pierre Drieu la Rochelle, deux auteurs intellectuels fascistes, collaborationnistes, antisémites et partisans de la thèse de la décadence sociale, responsable de la défaite de la France en 1940.
Pour ne pas être taxé de partisan des viticulteurs, l’État décide en 1935 de soutenir les bouilleurs de cru. Ainsi, par décret-loi du 25 juin, ils sont autorisés à distiller librement, moyennant le paiement par l’ensemble du département ou d’une fraction du département, d’une contribution fondée sur la moyenne des quantités d’alcool pur fabriquées pendant les campagnes précédentes. Cette réglementation suscite la colère de plusieurs professionnels de la distillation qui voit d’un mauvais œil l’encouragement de ces concurrents et de cette branche d’activité qui favorise le recours aux fraudes (Stiebel, 1935, p. 148). Cette colère est soulevée, entre autres, par l’écrivain Gilbert Stiebel dans son ouvrage, La mafia de la goutte, qui dénonce l’inégalité devant les impôts et les avantages accordés à cette filière au détriment des distillateurs professionnels. Il dénonce une égalité de tous devant l’impôt qui est « délibérément foulée aux pieds en faveur des bouilleurs de cru, lesquels payent soit rien, soit 1350 francs (moins 10%) de droit là où leurs concurrents distillateurs du commerce régulier en payent 2500. » (Ibid, p. 148)
La libération du marché des alcools de bouche atteint son apogée avec la signature du décret-loi du 8 avril 1938 par le second cabinet Blum permettant de porter le degré maximum pour les spiritueux à 45° et ceci, malgré la vive opposition des ligues antialcooliques (Domenichino, 2010). Cette libération permit à l’Etat de multiplier par dix les revenus sur les alcools entre 1916 et 1938. Les spiritueux en général et les boissons anisées en particulier sont les plus gros contributeurs avec une taxe de 25% instaurée en 1921 et augmentée de 30% en1931, une surtaxe de 100 francs par hl en 1933[18] et une dernière taxe s’élevant à 300 francs par hl servant à financer en partie le Code de la Famille du 29 juillet 1939.
Comme l’a démontré le cas de l’interdiction de l’absinthe en 1915, les périodes de guerre sont propices à la lutte antialcoolique avec l’instauration de mesures exceptionnelles acceptables pour la circonstance. C’est le cas après la chute de la Troisième République en juin 1940.
En effet, la fin de l’attractivité du marché des alcools de bouche avec à leur tête les apéritifs comme les liqueurs anisées est enclenché par le gouvernement Daladier qui prend alors en compte l’intérêt croissant pour le fléau de l’alcoolisme qui se fait sentir dans les mouvements populationniste et eugéniste (Berlivet, 2007) en se présentant comme étant « le promoteur d’une régénérescence nationale et morale » (Jackson, 2004, p. 133). Il décide alors d’intégrer au Code de la famille de juillet 1939 des dispositions antialcooliques, pénalisant en particuliers les apéritifs, c’est le fameux décret-loi du 29 juillet 1939 dit « Code de la famille ».
Le décret-loi, du 29 juillet 1939 limite le nombre des établissements autorisés à vendre des boissons alcooliques sur place avec un maximum fixé à un débit de boissons pour 300 habitants. Il durcit aussi le contrôle des bouilleurs de cru et encadre les modalités de vente des spiritueux titrant plus de 30° d’alcool. Néanmoins, au début de la guerre, le gouvernement favorise la consommation du vin, dont il existe un stock abondant, à travers des campagnes de « vin chaud du soldat » (Aurières, 1955, p. 152). L’offensive de ce gouvernement est fortement influencée par le lobby viticole, très représenté dans la sphère politique, soutenu par les ligues antialcooliques, les médecins, certains médias et milieux politiques qui militent dans l’entre-deux-guerres pour l’interdiction des apéritifs à base d’alcool, présentés comme la principale menace de déstabilisation sociale (Anderbegani, 2010, p. 18).
Les premières années de la Seconde Guerre mondiale sont ainsi accompagnées d’une série de mesures visant à faire diminuer la consommation d’apéritifs qui est, souvent, considérée comme l’une des causes de décadence sociale et de la défaite de la France. Aux yeux de l’opinion publique française, l’humiliation de la défaite semble « confirmer la dégénérescence de la France et donner aux autorités une justification morale et légale qui les autorisent à redresser la nation » (Howard, 2006, p. 221) . Vichy s’inscrivant dans la continuité de la lutte antialcoolique durcit la répression et vote la loi du 23 août 1940 qui prohibe certains apéritifs. Trois catégories sont ainsi interdites : ceux qui dépassent 16° d’alcool, les apéritifs anisés et ceux qui comprennent plus de 0,5 gramme d’essence de plante par litre. Tombe donc dans l’illégalité, pratiquement toutes les grandes marques d’apéritifs français (Ibid, p. 221). Il sera par contre possible pour certaines marques d’apéritifs à base de vin d’abaisser leur titrage à 16° pour poursuivre la vente.
Durcissant encore plus la lutte antialcoolique, la loi du 23 août 1940 est modifiée par la loi du 24 septembre 1941 qui interdit les apéritifs à base d’alcool, les apéritifs à base de vin titrant plus de 18°, les boissons alcoolisées contenant plus d’un demi-gramme d’essence par litre et toute publicité sur les apéritifs. De plus, dans les débits de boissons, la vente de boissons alcoolisées est interdite aux moins de 21 ans et pour les adultes, elle est interdite trois jours par semaine. Cette loi sonne la fin de l’attractivité du marché des alcools de bouche. Elle sera mise en œuvre durant l’année 1942 sur le territoire national, dans les colonies françaises et en outre-mer.
Le combat du régime de Vichy contre l’alcool ne semble pas chercher une complète prohibition. La cible désignée prioritairement est l’image véhiculé par les alcools distillés à travers la publicité qui marque la période de l’entre-deux-guerres. Les réclames financées par les propriétaires des grandes marques disparaissent ainsi des murs et retirées des cafés. Les images multiples et colorés de l’alcool sont à présent détruites. Bien évidemment, le vin est épargné car il est considéré par ce régime comme produit naturel tiré du sol français et constituant un élément essentiel de l’alimentation quotidienne de la population[19] (Prestwich, 1988). Cette lutte antialcoolique va durer jusqu’en 1944. C’est la fin de la belle époque du marché des alcools de bouche de l’entre-deux-guerres en France. Il faudra attendre le 24 mai 1951, jour de la promulgation de la loi relative au budget des prestations familiales agricoles, pour que la fabrication et la commercialisation des apéritifs qui avaient été interdites sous Vichy soit autorisées de nouveau[20] (Doublet, 1951).
Bibliographie
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[1] H. Leyret, En plein faubourg. Notations d’un mastroquet sur les mœurs ouvrières, Paris, Charpentier, 1895, dans F. Theofilakis, « À l’ombre du comptoir : débitants et débits de boissons à Belleville (1860-1914) », Revue d’histoire du XIXe siècle, n° 26-27 | 2003, 65-84.
[2] D’après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales), l’étymologie du mot apéritif, est construit autour de l’étymon aper du latin médiéval aperitivus, issu du latin aperire, qui veut dire ouvrir. Au XIIIe siècle, un médicament apéritif, est un médicament qui facilite les sécrétions de l’appareil digestif, c’est un laxatif. Au XVIIIe siècle, d’autres aliments comme le poivre et le vin sont présentés comme apéritifs c’est-à-dire, ils aident à la digestion, ils donnent de l’appétit. Le mot apéritif est ainsi, dans un premier temps, réservé à un usage médical. C’est durant la deuxième moitié du XIXe siècle que le mot apéritif commence à désigner une boisson alcoolisée prise avant le repas.
[3] Chartreuse, « Histoire des liqueurs » [En ligne] https://www.chartreuse.fr/histoire/histoire-des-liqueurs
[4]Normandie héritage, « L’incroyable histoire de la Bénédictine » [En ligne] http://www.normandie-heritage.com/spip.php?article168
[5] D’après une en-tête de facture datant de 1881, Écomusée du Pays de le cerise, Fougerolles.
[6] Le Matin, Paris, 24 juin 1936.
[7] Loi du 23 août 1940 publiée au Journal officiel du 24 août 1940. Elle interdit la fabrication, la commercialisation et la consommation de tous les apéritifs tirant à plus de 16°.
[8] Bulletin de Statistiques et de Législation comparée, 1914.
[9] 23 ligues antialcooliques sont recensées alors en 1903 d’après, Didier Nourrisson, Le Buveur du XIXe siècle, Paris, Albin Michel, 1990, p. 233
[10] Journal Le Matin, 15 juin 1907.
[11] Dans sa thèse soutenue en 1889 à Paris, sous le titre, Hérédité et alcoolisme, Etude psychologique et clinique sur les dégénérés buveurs et les familles d’ivrognes, le Docteur Legrain résume les rapports entre l’alcoolisme et la dégénérescence ainsi : « S’il est en effet deux propositions qu’on ait le droit de formuler aujourd’hui, ce sont les deux suivantes : l’infériorité cérébrale, cause directe des excès de boisson, trouve son origine le plus souvent dans l’hérédité, en d’autres termes les fils d’alcooliques sont dégénérés. Les rapports qui existent entre l’alcoolisme et la dégénérescence mentale se résume donc dans ce terrible cercle vicieux qui trouve sa confirmation aujourd’hui dans une infinité d’observations médicales les plus éloquentes ».
[12] L’alarme (affiche), Abel Faivre (illustrateur), 1914, Médiathèque de Roubaix (Cote, AFF001B1075).
[13] D’après le docteur Eugène Ledoux cité par M-C Delahaye, « Grandeur et décadence de la fée verte », Histoire, économie et société, volume 7, n° 4, 1988, p. 475-489.
[14] Le Matin, 15 juin 1907.
[15] L’Étoile bleue, mars 1923, p.30 et mars 1929, p. 12.
[16] Circulaire de Marius Roustan prescrivant l’enseignement du vin à l’école. Loi de propagande datant du 3 août 1931en faveur du vin. Archives nationales, F17 16007 ou F10 (agriculture), liasses 5383 et 5384. Comité national de propagande en faveur du vin.
[17] Un type d’alcoolisme qui ne touche pas particulièrement la classe laborieuse victime de l’alcoolisme de l’avant-absinthe mais pratiqué au sein des classes plus aisées et plus particulièrement les jeunes gens issus de ces classes.
[18] AN, F/10/2005, Ministère de l’Agriculture. Dossier 3 : « Boissons diverses », décret du 2 juin 1933 « relatif aux conditions de surtaxe instituée sur les apéritifs anisés à base d’alcool par l’article 65 de la loi du 28 février 1933 et par l’article 94 de la loi du 31 mars 1933 ».
[19] P. Prestwich, Drink and the politic of social reform. Antialcoholism in France since 1870, Society for the promotion of sience and scholarship, Palo Alto, California, 1988.
[20] J. Doublet, « La première législature de la IVe République et la législation démographique », Population, 6e année, N.3, 1951, p.556
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