La Prohibition au Canada et au Québec (1878-1930)

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Caroline Robert

Caroline Robert est doctorante en histoire à l’Université du Québec à Montréal et membre étudiante du Centre d’histoire des régulations sociales. Son mémoire de maitrise, « À qui la faute ? » : Le second mouvement de tempérance et l’État au Québec (1870-1922), aborde le contexte prohibitif et la nationalisation du commerce des alcools au Québec. Ses recherches doctorales portent sur les régulations morales et sociales de l’alcool au Québec entre 1921 et 1990.

La « noble expérience » étasunienne de la prohibition a marqué l’imaginaire de plusieurs, éclipsant bien souvent les expériences similaires ailleurs en Amérique du Nord. Tout comme son voisin du sud, le Canada a connu plusieurs formes de prohibition : nationale, provinciale et municipale. En effet, dès le milieu du XIXe siècle, une loi canadienne permet aux comtés et aux municipalités d’instaurer un régime prohibitif dans les limites de leur territoire. Durant la Première Guerre mondiale, l’une après l’autre, les provinces canadiennes imposent la prohibition complète du commerce des alcools, exception faite du Québec qui ne prohibe que les alcools distillés. Ainsi, entre 1919 et 1921, toutes les provinces canadiennes sont dotées d’un régime de prohibition. Contrairement aux États-Unis, où la prohibition s’étendait uniformément d’un océan à l’autre, le Canada a été témoin d’une pluralité de régimes prohibitifs. Cette communication vise donc à mettre en lumière cette diversité prohibitive au Canada tout en mettant l’accent sur le contexte québécois qui se révèle particulier par l’instauration d’une prohibition dite partielle de courte durée et par la nationalisation du commerce des alcools en 1921.  



(texte intégral)

Le[1] Québec est souvent cité comme l’exception nord-américaine qui, contrairement aux autres provinces canadiennes et aux États-Unis, n’a jamais adopté une politique prohibitive totale. Pour une courte période seulement (1919-1921), une prohibition partielle du commerce des spiritueux est mise en place à la suite d’un référendum populaire. Mettant fin à ce régime en 1921, l’État québécois opte pour une nationalisation du commerce des alcools, tout comme la Colombie-Britannique, province la plus à l’ouest du pays. Pour plusieurs historien.ne.s, ces mesures, en matière de régulation du commerce des alcools, témoignent d’un fort sentiment antiprohibitionniste de la part de la population de la « belle province ». Le flot continuel de touristes provenant des zones sèches canadiennes et étatsuniennes vers le Québec, principalement vers Montréal[2], vient renforcer la présomption d’une province profondément antiprohibitionniste.

L’historiographie a longtemps présenté la composition majoritairement francophone et catholique de la province comme le facteur explicatif de cette trajectoire nord-américaine différente[3]. En 2014, Michael Hawrysh souligne, dans son mémoire de maîtrise, que d’autres facteurs doivent être pris en considération. D’une part, pour la plupart des provinces canadiennes, la mise en place d’un régime prohibitif s’inscrit dans la foulée des mesures de guerre. Peu favorables à la guerre, surtout après la crise de la conscription[4], les Canadiens français du Québec auraient alors refusé la prohibition « perçue comme une autre mesure imposée par le reste du Canada »[5]. D’autre part, le rejet d’une prohibition totale exprimé lors du référendum de 1919 traduit uniquement l’opinion masculine sur la question. À l’opposé de leurs consœurs canadiennes, les femmes du Québec n’ont pas le droit de vote au moment de la consultation populaire[6]. Pour Hawrysh, ce facteur est déterminant puisque le vote féminin dans les autres provinces s’est révélé crucial dans la mise en place des régimes prohibitifs. Il émet alors l’hypothèse qu’il « est fort probable que le résultat du plébiscite de 1919 n’aurait pas été identique si les Québécoises avaient pu participer au scrutin »[7]. Les propositions que soumet Hawrysh nous semblent des pistes intéressantes, mais ce dernier ne développe pas plus loin son argumentaire, admettant que le Québec est tout simplement « le mouton noir de la prohibition »[8].

Généralement perçue comme une province n’ayant pas adhéré au projet prohibitionniste du tournant du XXe siècle, le sujet de la prohibition a fait l’objet de peu de recherches au Québec. On a donc peu réfléchi aux raisons derrière une faible application de mesures restrictives à l’échelle provinciale, se contentant de l’explication coutumièrement admise de l’appartenance ethnoreligieuse (francophone catholique). De plus, le peu d’intérêt porté par les historien.ne.s à cette question a participé à oblitérer les autres formes d’expériences prohibitives vécues en sol québécois à cette époque. Ainsi, cet article vise à réfléchir à l’enjeu de la prohibition au Québec entre 1867 et 1921. Nous nous demandons quels sont les facteurs qui ont mené à l’établissement d’une politique prohibitive distincte au Québec ? Pour mener à bien notre réflexion, nous avons dépouillé différentes archives dont des documents légaux et politiques (lois, débats de l’Assemblée nationale, rapports), des journaux ainsi que la riche littérature portant sur la tempérance et la prohibition. Nous postulons que loin d’avoir été antiprohibitionniste la province québécoise a été au diapason de la vague prohibitionniste nord-américaine, en optant cependant pour des méthodes d’applications différentes. En développant la proposition faite par Michael Hawrysh à propos du rejet des mesures d’initiative fédérale, nous croyons que le déploiement de mesures prohibitives distinctes s’explique en raison de la culture politique[9] québécoise de l’époque qui accorde une grande importance au principe de gouvernance municipale.

Afin que notre propos soit limpide, nous amorcerons notre article par une brève mise en contexte de la situation politique et sociale touchant les questions relatives aux régulations de l’alcool au Québec. Nous nous arrêterons par la suite sur la position du Québec face aux mesures prohibitives fédérales. Finalement, nous nous interrogerons sur les diverses formes que la prohibition a pu prendre au Québec.

La situation politique et sociale du Québec

La loi constitutionnelle de 1867, texte législatif à la base de la Confédération canadienne, introduit le principe du partage des compétences entre le gouvernement fédéral (Canada) et les gouvernements provinciaux. Les compétences législatives en matière de commerce des alcools ont provoqué plusieurs débats constitutionnels au tournant du XXe siècle[10]. À terme, il est déterminé que « le Parlement canadien a la compétence de légiférer en la matière conformément à son pouvoir résiduel de paix, ordre et bon gouvernement »[11] et que les secteurs de la fabrication et du commerce interprovincial relèvent exclusivement de lui. Pour leur part, « les provinces ont la compétence de légiférer en matière de commercialisation de l’alcool sur leur territoire »[12]. En d’autres mots, les provinces déterminent les conditions de vente en plus de baliser les normes de consommation dans l’espace public. Dans le cas du Québec, on doit aussi ajouter que pour la période qui nous intéresse « le gouvernement local occupe une position stratégique […] et hérite de compétences qui touchent directement la population »[13]. Ainsi, jusqu’en 1921, l’émission de licences pour la vente de boissons alcoolisées relève essentiellement des gouvernements municipaux qui ont aussi un pouvoir décisionnel en matière d’heures d’ouverture des lieux de vente. En conséquence, cette séparation des pouvoirs en trois paliers de gouvernance offre aux associations qui militent en faveur de la tempérance et de la prohibition plusieurs points de pressions afin d’atteindre leurs objectifs.

Cette organisation étatique tripartite a notamment influencé la structure de différentes associations militantes pour la tempérance et la prohibition au Canada. Ces groupes se sont surtout formés suite à la Confédération, dans un contexte où les préoccupations envers les méfaits sociaux et moraux associés à la consommation d’alcool sont grandissantes. Pour la majorité d’entre eux, la pauvreté et la criminalité trouvent leurs explications dans la consommation d’alcool. Restreindre l’accès à ce produit, et ultimement l’interdire complètement, permettrait, selon eux, d’enrayer ces problèmes sociaux. Au tournant du XXe siècle le Québec compte trois grandes associations, la Quebec Branch of the Dominion Alliance for the Total Suppression of the Liquor Traffic (QBDA), la Woman’s Christian Temperance Union of the Province of Quebec (W.C.T.U.) et la Ligue Antialcoolique. Cette dernière compte deux divisions, une à Montréal et l’autre à Québec. Celles d’allégeance anglo-protestante sont rattachées aux organisations nationales canadiennes et elles ont diverses sections locales réparties un peu partout à travers le territoire québécois. Comme nous l’avons souligné un peu plus tôt, ces associations respectent la structure politique tripartite en place au Canada. Finalement, la cause québécoise en faveur de la tempérance et de la prohibition compte aussi sur le soutien, dans une moindre mesure, du comité de tempérance de la Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste, premier regroupement féministe canadien-français. Composé principalement d’hommes, le mouvement antialcoolique québécois diffère des autres mouvements nord-américains où les femmes sont très actives.  Divers facteurs permettent d’expliquer cette situation, mais il semble que l’importance des communautés religieuses catholiques féminines dans les services sociaux (institutions charitables et de santé), là où les organisations de femmes laïques anglophones sont actives, « a constitué pour les laïques [francophones] une sorte d’handicap politique »[14], limitant par le fait même leur participation à la lutte contre l’intempérance.  Se faisant, l’hypothèse d’Hawrysh voulant que l’absence de prohibition provinciale au Québec s’explique par l’incapacité politique des femmes nous semble probable, mais pas nécessairement déterminante. Il faut plutôt regarder du côté de la culture politique québécoise afin de comprendre les raisons qui ont mené à un système prohibitif différencié. Les réactions québécoises face aux tentative prohibitives fédérales, déployées dans le dernier tiers du XIXe siècle, nous permettent de prendre la mesure du principe de gouvernance municipale, élément déterminant de la culture politique du tournant du XXe siècle.

Les tentatives prohibitives fédérales

Au XIXe siècle, les demandes afin de réguler plus strictement le commerce des alcools sont principalement adressées au gouvernement fédéral canadien. La première revendication des militants de la Dominion Alliance, organisation antialcoolique nouvellement formée, vise à permettre l’application de l’Acte de tempérance de 1864 au travers du nouveau Dominion. Cette loi, adoptée sous le gouvernement de l’Union[15], est alors uniquement en vigueur dans les provinces du Québec et de l’Ontario. En 1878, face aux demandes répétées des groupes de tempérance le parlement canadien adopte L’Acte de tempérance du Canada, appelé « Loi Scott » en raison de son promoteur, le député R.W. Scott, sans toutefois abolir la loi précédente. Inspirée de l’Acte de tempérance de 1864, cette nouvelle loi donne à l’ensemble des comtés et des municipalités canadiennes la possibilité de tenir un référendum populaire afin de prohiber le commerce des alcools dans les limites de leur territoire. Selon cette loi, le processus référendaire doit s’enclencher à la suite du dépôt d’une pétition représentant 25% des électeurs du comté ou de la municipalité. Dans le cas d’une majorité positive, un régime prohibitif est mis en place pour une durée minimale de trois ans. Certaines exceptions sont prévues dans la loi, dont la vente à des fins médicales, sacramentelles et industrielles, par les détenteurs de licences spéciales, ainsi que la vente directe par les producteurs d’alcools (cidreries, brasseries, distilleries)[16]. Selon l’historien Craig Heron, l’application de l’Acte de tempérance du Canada a eu plus de succès dans les régions rurales de l’Ontario, du Manitoba et des provinces maritimes[17]. Au Québec, entre 1879 et 1921, vingt-neuf référendums ont été organisés. Ces consultations ont mené à des régimes de prohibition dans huit comtés et deux municipalités[18]. Le recours modéré à la « Loi Scott » au Québec explique, dans une certaine mesure, pourquoi l’historiographie a longtemps considéré le cas québécois comme une exception. Très peu d’auteur.rice.s se sont toutefois penchés sur l’application par les conseils municipaux de mesures prohibitives locales au Québec, nous y reviendrons.

Un autre évènement a contribué à la réputation antiprohibitionniste du Québec, le référendum pancanadien sur la prohibition de 1898. Lors de sa formation, au courant des années 1870, la branche québécoise de la Dominion Alliance inscrit dans sa constitution le projet prohibitif comme son axe principal.

1. That it is neither right nor politic for the State to afford legal protection and sanction to any traffic or system that tends to increase crime, to waste the national resources, to corrupt the social habits and to destroy the lives and health of the people. 2. That the history and results of all past legislation in regard to the liquor traffic abundantly proved that it is impossible satisfactorily to limit or regulate a system so essentially mischievous in its tendencies. 3. That rising above sectarian and party considerations, all good citizens should combine to procure an enactment prohibiting the manufacture and sale of intoxicating beverages as affording the most efficient aid in removing the appalling evil of intemperance[19].

Des engagements similaires sont pris par les autres branches canadiennes et elles exercent ensemble des pressions sur l’État fédéral afin que des lois plus strictes en matière de commerce d’alcool soient adoptées. Ces diverses pressions poussent le parlement fédéral à adopter différentes initiatives afin de calmer l’opinion publique. En 1892, une Commission Royale d’enquête sur le commerce des liqueurs est mise sur pied. Après avoir tenu des audiences partout au pays, et aussi aux États-Unis, les commissaires déposent leur rapport, en 1895, et se prononcent en majorité contre la prohibition[20]. Trois ans plus tard, l’État fédéral annonce la tenue d’une consultation populaire à l’échelle du Canada à propos d’une prohibition nationale de l’importation, de la fabrication et de la vente de liqueurs enivrantes[21]. L’annonce du plébiscite, prévu pour le 29 septembre 1898, ne provoque pas de mobilisation politique particulière. Pour Benoit Dostie et Ruth Dupré, qui ont étudié cet évènement, « it thus appears to have been a short campaign with rather mild fervor and intensity, especially in Montreal »[22]. Moins de 50% des électeurs canadiens[23] se présentent aux urnes et le résultat final accorde la victoire au « oui » prohibitif, avec 51.3% des voix. Cependant, le gouvernement canadien, avec à sa tête Wilfrid Laurier, décide de ne pas aller de l’avant considérant le faible taux de participation. Dans une lettre adressée à Francis Stephen Spence, secrétaire de la branche ontarienne de la Dominion Alliance, Laurier explique que « no good purpose would be served by forcing upon the people a measure which is shown by the votre to have the support of less than twenty-three per cent. of the electorate »[24]. Pour certain.e.s chercheur.euse.s, le recul du gouvernement de Laurier s’explique principalement par le résultat enregistré au Québec qui donne la victoire au « non » à plus de 80%, avec un taux de participation de 45%[25]. Cette interprétation participe considérablement à la croyance que les Canadiens français sont d’ardents antiprohibitionnistes. D’ailleurs, pour Marc-Yvan Rouleau seule l’appartenance à la francophonie, qui, selon lui, répugne la prohibition à cause de son atteinte aux libertés individuelles, permet d’expliquer le résultat québécois au plébiscite de 1898[26]. S’il est vrai que les francophones ont voté en majorité contre le projet de prohibition national, ce n’est pas parce que cette mesure leur répugne davantage que les anglophones. Pour Ruth Elizabeth Spence, qui analyse le référendum quelques années plus tard, les motifs derrière ce rejet francophone doivent être recherchés ailleurs puisqu’au moment du plébiscite une bonne part des municipalités de la province sont déjà sous des régimes prohibitifs (603 sur 933)[27].  L’explication la plus probable trouve, selon nous, sa source dans la culture politique de l’époque qui favorise le principe de gouvernance municipale. Ainsi au moment du vote de 1898, la plupart des électeurs du Québec ne considèrent pas que cette question relève de l’État fédéral, mais bien des conseils municipaux.  

L’échec du projet de prohibition pancanadien pousse les forces prohibitionnistes à concentrer leurs efforts vers les législatures provinciales et les autorités municipales[28].  Dans le cas du Québec, on constate une intensification des revendications auprès des pouvoirs provinciaux à partir de 1905. Toutefois, comme un peu partout en Occident, la Première Guerre mondiale représente le moment crucial de la prohibition.

Le Québec et la prohibition

En 1905, Mgr Paul Bruchési, archevêque de Montréal, lance officiellement une « croisade » contre l’intempérance. Le Québec n’est pas totalement étranger à ce genre de campagne à grand déploiement puisqu’au milieu du XIXe siècle l’abbé Charles Chiniquy avait lancé un mouvement similaire[29]. À la différence du mouvement mené de front par Chiniquy, surtout axé sur la réforme morale des individus, celui lancé par Bruchési invite à « sortir des constatations théoriques et des lamentations stériles. L’heure est venu [sic], pour tous, d’entrer résolument dans la voie des réalisations pratiques »[30]. Pour ce faire, il fait appel « plus spécialement au concours actif et persévérant des pouvoirs publics »[31] qui « savent quelles mesures prendre pour combattre ce fléau »[32] de l’intempérance. Bruchési insiste aussi sur la création de ligues de tempérance et les invite à réclamer, auprès des autorités, des mesures appropriées afin de réprimer le vice de l’alcool[33]. L’appel est entendu et plusieurs groupes franco-catholiques se forment, dont les ligues antialcooliques de Québec et de Montréal. L’historiographie québécoise a longtemps identifié ce moment comme le début d’un second mouvement de tempérance au Québec. S’il est vrai que la publication de Bruchési provoque un certain engouement populaire ainsi que la création d’organisations militantes chez les franco-catholiques, les préoccupations envers l’intempérance sont déjà bien présentes au sein de la société québécoise. L’inquiétude face au « fléau » de l’alcoolisme, qui serait à la source de nombreux problèmes sociaux, a provoqué la mise en place de nombreux régimes prohibitifs locaux à partir du dernier tiers du XIXe siècle.

L’Acte de tempérance de 1864 continu d’être mobilisé après la Confédération. D’ailleurs, ce sont ces mesures de prohibition municipales qui ont eu plus de succès au Québec. Pratiquement inchangé en 100 ans, l’Acte devenu la Loi de tempérance du Québec stipule que « Le conseil municipal de chaque comté, cité, ville, canton, paroisse ou village, constitués en corporation peut, en tout temps, […] faire un règlement pour prohiber la vente des liqueurs enivrantes et l’octroi de licences pour cet objet, dans les limites de la municipalité »[34]. Contrairement à la Loi Scott, qui exige le dépôt d’une pétition des citoyens et la tenue d’un référendum sur la question de la prohibition locale, la Loi de tempérance du Québec ne rend pas obligatoire ce processus[35].

Certaines sources nous renseignent sur la popularité de cette mesure, sans connaitre en détail l’ensemble des prohibitions locales mises en place au Québec. Ainsi, pour l’année 1911-1912, la branche québécoise de la Dominion Alliance rapporte que 75% des municipalités sont sous des régimes prohibitifs locaux[36]. En 1918, le trésorier de la province de Québec, Walter Mitchell, souligne devant l’Assemblée législative que 1 097 des 1 187 municipalités existantes ont opté pour la prohibition[37]. Ainsi, loin d’être antiprohibitionniste, le Québec opte tout simplement pour une régulation municipale du commerce des alcools. Cette gestion à plus petite échelle s’inscrit dans la culture politique de l’époque qui privilégie une gouvernance municipale forte[38].

Cependant, si dans l’ensemble une bonne partie de la population québécoise privilégie une gestion municipale du commerce des alcools, le l’État provincial détient toujours le monopole législatif en cette matière. Un mouvement de réforme fait donc pression sur l’État provincial afin de raffermir la législation. Ces pressions ont d’ailleurs mené à l’établissement d’une Commission royale d’enquête sur les licences, en 1912. Le rapport déposé l’année suivante propose plusieurs avenues de réglementation plus sévère, mais s’oppose à la mise en place d’un régime de prohibition dans l’ensemble de la province, soulignant que pareil régime favoriserait le trafic illégal[39]. Plutôt que la prohibition, le rapport propose un autre système de régulation de l’alcool inspiré des modèles scandinaves, tels que les systèmes Gothembourg en Suède et Bergen en Norvège. Ces systèmes, selon les commissaires, n’interfèrent pas autant dans la logique régulatoire libérale. Le modèle proposé s’inscrit aussi dans la culture politique de l’époque en suggérant un contrôle local du commerce des alcools. Les lieux de vente seraient administrés par des citoyens réputés respectables et les profits réalisés seraient partagés entre la municipalité et le trésor provincial[40]. Le rapport de 1913 a un impact plutôt modéré sur la législation. Seules quelques recommandations ont été mises en place, dont une réduction du nombre de lieux de vente et la hausse de l’âge légal de consommation, passant de 18 ans à 21 ans. 

En application depuis le milieu du XIXe siècle, le cadre législatif encadrant le commerce provincial des alcools semble de plus en plus désuet en raison des nombreux changements sociaux, politiques et économiques. Devant l’ampleur du mouvement antialcoolique, le contexte prohibitif nord-américain grandissant et l’impact de la Première Guerre mondiale, l’État québécois se voit dans l’obligation de revoir complètement ses politiques en matière de régulation de l’alcool. À cet égard, la mise en place, en 1919, d’un régime de prohibition témoigne d’une renégociation des politiques relatives à l’alcool, mais aussi d’une certaine transition dans la culture politique québécoise.

 La Loi de prohibition provinciale – 1919

Comme un peu partout en Occident, le contexte sociopolitique particulier remet la question de la prohibition à plus large échelle à l’avant-plan au Québec. En avril 1918, toutes les provinces canadiennes, exception faite du Québec, ont adopté un régime prohibitif provincial. Parallèlement, le gouvernement fédéral interdit l’importation, la fabrication et le transport d’alcool sur tout le territoire canadien. Toutefois, n’ayant pas adopté la prohibition, le gouvernement du Québec bénéficie d’un sursis quant à la fabrication d’alcool sur son territoire, jusqu’au 31 décembre 1918[41]. Ce n’est qu’à partir du 1er mai 1919, que la population québécoise est soumise à un régime de prohibition, quant à lui partiel visant uniquement le commerce des spiritueux.  Comme plusieurs l’ont souligné, la Première Guerre mondiale a servi de catalyseur aux forces prohibitionnistes qui ont pu évoquer des arguments de nature patriotique pour favoriser la mise en place de nombreux régimes « secs »[42].

Au Québec, la situation nous semble quelque peu différente. Sans nier l’influence qu’a pu avoir le conflit mondial dans la mise en place d’un régime prohibitif à grande échelle, il semble que l’élément déclencheur de l’adoption de cette nouvelle législation soit plutôt la prohibition fédérale et la volonté de l’État québécois de conserver son autonomie provinciale. Le journal La Presse souligne en ce sens que le gouvernement provincial désire mettre en place un régime prohibitif « par la crainte de voir le gouvernement fédéral imposer cette mesure à la province de Québec »[43].  À son tour, le trésorier de la province, Walter Mitchell, lors de la présentation du projet de loi de prohibition, explique : 

Cette attitude du gouvernement est justifiée en tenant compte […] de la situation créée au pays depuis l’ordre en conseil fédéral adopté en vertu de la loi sur les mesures de guerre […] En raison de cet ordre, il est clair qu’à l’intérieur d’une année, l’approvisionnement en liqueurs légalement importées au pays sera épuisé et avec l’interdiction de fabrication, ça voudra dire que l’approvisionnement en bière, whisky et autres liqueurs intoxicantes fabriquées au Canada sera épuisé au même moment. Ainsi, le gouvernement provincial se trouverait à donner des licences pour vendre des produits qui n’existeront pas légalement[44].

Le gouvernement considère aussi que le nombre élevé de municipalités ayant adopté des mesures prohibitives locales témoigne d’un sentiment populaire favorable à une législation provinciale sur la prohibition[45]. Lors de la présentation du projet de loi, plusieurs députés s’y opposent en arguant que cette mesure est une « atteinte à la liberté de l’individu »[46]. D’autres soulèvent le spectre de la contrebande et affirment que « fermer la buvette, c’est allumer l’alambic » ou que la prohibition ne peut mener qu’à l’augmentation de consommation de drogues, « habitude plus pernicieuse »[47]. Certains députés réclament en outre que la vente des bières, vins et cidres soit exclue de la loi, puisque ces boissons sont alors reconnues pour favoriser la tempérance. Cette proposition est rejetée et la loi est intégralement adopté en chambre le 7 février 1918[48]. Cette dernière prohibe l’émission de tout type de licences de vente de liqueurs enivrantes « excepté pour la vente du vin pour des fins sacramentelles et de liqueurs enivrantes pour des fins de médecine, de mécanique, de fabrication et d’industrie »[49]. Elle doit entrer en vigueur le 1er mai 1919.

Rapidement, des représentations sont faites auprès du gouvernement afin que la loi soit assouplie[50]. La puissante Association des brasseurs de la Province de Québec entreprend alors une vaste campagne publicitaire dans les journaux afin de plaider la cause de la bière. Dans de nombreuses publicités, elle invite les gens à écrire directement au Premier Ministre afin de soustraire la bière des boissons prohibées. Devant ces différentes manifestations d’opposition, un deuxième projet de loi de prohibition est présenté en chambre, en mars 1919 :

Le gouvernement, en raison des nombreuses représentations qui lui ont été faites, à cause des centaines et des centaines de requêtes, télégrammes et dépêches qu’il a reçus de tous les points de la province, croit que cette question est d’une importance si considérable et que l’opinion du public de la province est si divisée que nous ne croyons pas que nous puissions prendre sur nous de décréter la vente de la bière ou du vin alcoolisé.[51]

Le gouvernement soumet alors les électeurs québécois au premier référendum provincial de l’histoire du Québec, portant sur la question précise de la vente des bières, cidres et vins légers[52]. Quelques jours avant la tenue de la consultation, un comité de modération en faveur du vin et de la bière est fondé dans le but « de fournir aux électeurs toutes les informations utiles au sujet du plébiscite »[53]. Le comité, formé de nombreux hommes influents issus de différents milieux professionnels[54], fait, à son tour, paraître de nombreuses publicités dans les quotidiens québécois en faveur de leur position. De leur côté, les tenants de la prohibition sont plutôt effacés dans l’espace public. Ruth Elizabeth Spence, dans son ouvrage sur la prohibition publié quelque temps après le référendum, évoque quelques pistes d’explications. Elle affirme que « the temperance forces, […] were disorganized »[55] et que seul le clergé anglo-protestant s’est organisé et prononcé en faveur de la prohibition[56]. Pourtant, la revue La Tempérance, mensuel phare du mouvement antialcoolique catholique, insiste, à partir de 1916, sur les bienfaits qu’un régime prohibitif à grande échelle pourrait avoir, tout en continuant de privilégier une régulation locale et de proximité[57]. La revue qualifie même l’adoption de la loi de 1918 de couronnement[58]. À l’approche du référendum, trois associations franco-catholiques, dont les Ligues antialcooliques de Montréal et Québec, en plus de certains membres du clergé catholique se prononcent, dans un quotidien, en faveur du régime prohibitif provincial et invitent la population à voter « non »[59].

Le 10 avril 1919, la question suivante est posée à l’électorat : « Êtes-vous d’opinion que la vente des bières, cidres et vins légers, tels que définis par la loi, devrait être permise ? »[60]. Avec un taux de participation d’environ 50%, le résultat est de 178 112 pour et 48 433 contre[61]. Le Québec entre alors dans une phase de prohibition partielle où le commerce des spiritueux est interdit. Encore une fois, ce résultat à l’échelle provinciale donne l’impression d’un Québec profondément antiprohibitionniste. Cependant, rappelons que la plupart des municipalités du Québec sont, à ce moment, sous un régime de prohibition locale. Il peut alors apparaitre singulier que la majorité des comtés électoraux ayant un territoire dit « sec » a voté en faveur du système de prohibition partielle[62]. En fait, il ne faut pas interpréter ce résultat comme la démonstration d’un fort sentiment antiprohibitionniste de la part de la population votante, mais plutôt comme le refus d’une ingérence provinciale dans les affaires que l’on considère alors du ressort de la gouvernance municipale.

À partir du 1er mai 1919, la bière, le vin et le cidre peuvent être vendus dans les municipalités qui ne sont pas sous un régime de prohibition locale. En revanche, la vente des liqueurs spiritueuses, à l’exception de celles utilisées pour des fins médicales, sacramentelles et industrielles, est maintenant interdite partout. Seuls vingt-cinq vendeurs, autorisés par le gouvernement, peuvent procéder à la vente de liqueurs fortes sous présentation de certificats d’autorisation signés par une autorité compétente tels que les médecins et les membres du clergé. Ce système d’exception a rapidement posé de nombreux problèmes, tout comme l’ensemble des mesures prohibitives à grande échelle. 

Constatant l’éclosion immédiate de la contrebande, plusieurs députés en chambre, dont Arthur Sauvé, chef de l’opposition, se sont élevés contre la violation continuelle de cette loi, qui « n’est pas observée, et non seulement elle est violée par des citoyens, mais des officiers du gouvernement se rendent coupables des plus criants abus »[63]. L’année suivante, Sauvé renchérit en affirmant que « cette loi est une odieuse et ignoble farce, un scandale révoltant, et est violée outrageusement par certains favoris du gouvernement »[64]. Un trafic de prescriptions médicales, afin de se procurer de l’alcool, s’est même érigé au Québec[65]. Le député Sauvé affirme même qu’un des officiers de la loi, un certain J.W. Lewis, est à la source du problème : « Dans le bureau de Lewis, […] on vendait des “pads” de certificats signés d’avance de faux noms de médecins 40$ la page »[66]. Le trésorier Mitchell admet l’existence de ces pratiques illégales et souligne en ce sens que « des certificats ont été émis en très grand nombre, et souvent sous de faux noms de médecins […] On a découvert récemment qu’un médecin a émis, l’an dernier, plus de 4 000 prescriptions »[67]. Dans un article titré « Notre fausse loi de prohibition », du quotidien L’Avenir du Nord, il y est relaté que « les vendeurs autorisés se moquent la plupart du temps du certificat médical qu’ils doivent exiger et vendent sans limites à tout le monde : aux ivrognes, aux jeunes gens, aux femmes même »[68].

Ainsi au lieu de rendre plus sobre et plus morale la province, objectif poursuivi par le mouvement antialcoolique, le système de prohibition semble avoir eu l’effet contraire en intensifiant le trafic illégal de spiritueux et de drogues[69], en plus de créer des problèmes de santé publique avec de l’alcool mal frelaté[70]. Tout comme l’avaient déjà souligné les commissaires de la Commission royale d’enquête, en 1913, la prohibition à grande échelle apparait comme une mesure difficilement praticable. Au regard des autres expériences prohibitives en Amérique du Nord, nous devons reconnaître à l’instar de Mark Lawrence Schrad que « the prohibition of alcohol was a mistake – a historic policy gaffe and a political fiasco »[71].

N’ayant pas à l’époque les structures de contrôle et de répression adéquates à l’application de la loi de prohibition, subissant parallèlement une perte de revenus considérable au profit de contrebandiers, les autorités provinciales envisagent rapidement une autre avenue afin de réguler le commerce de l’alcool. C’est dans ce contexte qu’est créée la Commission des liqueurs de Québec (CLQ), organe étatique qui chapeaute à partir de 1921 l’ensemble de la commercialisation des alcools. L’État se dote, par la même occasion, d’une structure de contrôle et de répression propre à ce secteur, avec la Police des liqueurs. Cette configuration régulatoire, qui reste en place jusqu’en 1961, s’inscrit dans une transition de la gouvernance politique du Québec qui, à partir de la Première Guerre mondiale, amorce une centralisation des pouvoirs vers le provincial au détriment du municipal. Cette centralisation est visible dans d’autres champs d’intervention dont celui de la santé publique[72]. Tout en laissant une part de responsabilités aux municipalités, l’État québécois encadre avec plus d’attention ces différents secteurs. Dans le cas qui nous concerne, s’il est vrai que la création de la CLQ représente un moment transitoire dans la régulation du commerce des alcools, l’État québécois laisse tout de même la responsabilité de la prohibition aux municipalités, ce qui explique la persistance de nombreux régimes de prohibition locale.

CONCLUSION

Ce que le 31e président des États-Unis, Herbert Hoover, a qualifié de « noble expérience » étasunienne a très certainement influencé la manière dont on perçoit aujourd’hui la prohibition. En comparaison, tout régime s’écartant d’une prohibition globale similaire aux États-Unis laisse croire à une approche plus libérale. Les historiens de la prohibition au Québec ont défendu cette thèse d’une approche libérale, d’autant plus qu’elle semblait être confirmé par le postulat nationaliste d’une spécificité de la société québécoise dans l’ensemble du Canada. D’ailleurs, les quelques publications historiques consacrées à ce sujet ont été publiées à des moments où l’on tentait de définir l’identité québécoise comme distincte de celle du reste du Canada[73]. Ainsi, les facteurs menant à un régime prohibitif différent au Québec ne sont pas d’origine identitaire, comme l’a longtemps laissé penser l’historiographie, mais trouvent plutôt leurs sources dans la culture politique québécoise qui valorise particulièrement la gouvernance municipale du moins avant la fin des années 1930. Considérant le grand nombre de municipalités ayant mis en place des régimes de prohibition durant une période relativement longue à partir du au tournant du XXe siècle[74], il nous semble difficile de présenter le Québec comme d’une province antiprohibitionniste. Quant à la création en 1921 de la Commission des Liqueurs de Québec, qui instaure un régime apparaissant plus permissif que la prohibition en vigueur un peu partout en Amérique du Nord, elle doit être interprétée comme un projet d’encadrement du commerce des alcools complémentaire aux actions prohibitives locales[75].


[1] Je tiens à remercier le comité organisateur du colloque Prohibition 1919-2019 pour l’invitation et je salue l’ensemble des panélistes qui ont offert des conférences pertinentes et enrichissantes. Ma reconnaissance va également à Martin Petitclerc et Philipp Portelance pour leur relecture attentive et leurs commentaires.

[2] Cette affluence touristique provoque le fulgurant développement de l’industrie culturelle et nocturne de Montréal qui se voit alors nommé populairement le « petit Paris de l’Amérique ».

[3] Marc Yvan Rouleau, Le Québec dans le plébiscite canadien de 1898 sur la prohibition, mémoire de maîtrise, histoire, Université Concordia, 1979, p.70; Pierre Rousseau, La réglementation du commerce des alcools à Sherbrooke, 1880-1921, mémoire de maîtrise, Université de Sherbrooke, 1984, p.32; Craig Heron, Booze, A Distilled History, Toronto, Between the Lines, 2003, pp.194-196.

[4] Devant un faible enrôlement volontaire, le gouvernement du Canada, dirigé par Robert Laird Borden, rend le service militaire obligatoire. Cette obligation est mal accueillie au Québec où plusieurs émeutes éclatent, poussant même les autorités à proclamer la loi martiale. Paul-André Linteau, René Durocher et Jean-Claude Robert, Histoire du Québec contemporain, de la Confédération à la crise (1867-1929), Montréal, Éditions du Boréal, 1989, pp.689-693.

[5] Michael Hawrysh, Une ville bien arrosée : Montréal durant l’ère de la prohibition, 1920-1933, Mémoire de maitrise, Histoire, Université de Montréal, 2014, p.29.

[6] Le suffrage féminin au Québec ne sera obtenu qu’en 1940. Pour en savoir plus, Denyse Baillargeon, Repenser la nation : l’histoire du suffrage féminin au Québec, Montréal, Éditions du Remue-Ménage, 2019, 235p.

[7] Michael Hawrysh, Op.cit., p.29.

[8] Ibid., p.28.

[9] Le concept de « culture politique » est sujet à débat. Nous utilisons ce concept dans le sens que lui donne Harold Bérubé et Amélie Bourbeau, « le concept de culture politique recouvre plus largement les discours et les pratiques qui constituent le monde politique et qui s’en dégagent à une échelle donnée », Harold Bérubé et Amélie Bourbeau, « Réflexions en vue d’une étude de la culture politique municipale au Québec (1855-1939) (Note de recherche) », MENS, Revue d’histoire intellectuelle et culturelle, vol.17, no 1-2, automne 2016-printemps 2017, p.33.

[10] Pour en savoir plus voir Malaika Bacon-Dussault, « L’importation interprovinciale des boissons alcoolisées à des fins personnelles : R c. Comeau et la confirmation de règles de droit de la période de la prohibition », McGill Law Journal – Revue de droit de McGill, vol.64 :1, 2018, pp.167-191.

[11] Ibid., p.175.

[12] Ibid., p.179

[13] Harold Bérubé et Amélie Bourbeau, Loc.cit., p.23.

[14] Marta Danylewycz, Profession : religieuse, Un choix pour les Québécoises, 1840-1920, Montréal, Boréal, 1988, p.198.

[15] Cette loi autorise les conseils municipaux à « passer un règlement pour prohiber la vente des liqueurs enivrantes et l’octroi de licence à cet effet », Statuts de la province du Canada, « Acte de tempérance de 1864 », 27-28 Victoria, chapitre 18, article 1, 1864.

[16] Ruth Elizabeth Spence, Op.cit., pp.123-124.

[17] Craig Heron, Op.cit., p.160. Pour en savoir plus sur le mode d’application de la loi voir Jacques-Paul Couturier, « Prohiber ou contrôler ? L’Acte de tempérance du Canada à Moncton, N.-B., 1881-1896 », Acadiensis, vol.17, no 2, printemps 1988, pp.2-26.

[18] Annuaire statistique du Canada 1900, 1901, 1912, 1914, 1916-1917 et 1921. 

[19] Quebec Branch of the Dominion Alliance for the Total Suppression of the Liquor Traffic, Proceedings of the Twenty-Eighth Annual Meeting of Quebec Provincial Branch of the Dominion Alliance Held in Montreal, on the 14th of March, 1907, Montreal, The Witness Press, 1907, p.1, Archives de la chancellerie, Archidiocèse de Montréal, Dossier 790-026 – The Dominion Alliance for the Total Suppression of the Liquor Traffic/Montreal Alliance Vigilance Committee (1875-1913), doc.907-3.

[20] Sur les cinq commissaires, un seul est en faveur de la prohibition. Pour en savoir plus, Craig Heron, Op.cit., p.171.

[21] Marc-Yvan Rouleau, Op.cit., p.26. Pour une analyse plus détaillée sur le référendum de 1898, à l’échelle canadienne voir Benoit Dostie et Ruth Dupré, « « The People’s will » : Canadians and the 1898 Referendum on Alchohol Prohibition », Explorations in Economic History, 49, 2012, pp.498-515.

[22] Benoit Dostie et Ruth Dupré, Loc.cit., p.502.

[23] À partir de 1898 « les conditions requises pour habiliter une personne à voter lors d’une élection fédérale sont les mêmes que celles qui l’habilitent à voter à des élections provinciales tenues dans sa propre province ». Dans le cas du Québec où le suffrage était censitaire, les électeurs étaient des hommes de 21 ans et plus nés ou naturalisés sujets britanniques. Élection Canada, L’histoire du droit de vote au Canada, 2007 [en ligne] consulté le 27 août 2018, http://www.elections.ca/content.aspx?section=res&dir=his&document=chap2&lang=f#a2

[24] Lettre de Wilfrid Laurier adressée à Francis S. Spence, 4 mars 1899, reproduite dans Ruth Elizabeth Spence, Op.cit., p.252.

[25] Craig Heron, Op.cit., p.172, Benoit Dostie et Ruth Dupré, Loc.cit., p.504.

[26] Marc-Yvan Rouleau, Op.cit., p.70.

[27] Ruth Elizabeth Spence, Op.cit., p.250.

[28] Benoit Dostie et Ruth Dupré, Loc.cit., p.504.

[29] Pour en savoir plus, Jean-Patrice Arès, Les campagnes de tempérance de Charles Chiniquy : Un des principaux moteurs du réveil religieux de 1840, Mémoire de maitrise, Sciences des religions, Université du Québec à Montréal, 1990, 347p.

[30] Mgr Paul Bruchési, « Lettre pastorale et mandement de Mgr Paul Bruchési, Archevêque de Montréal, Inaugurant une croisade contre l’intempérance, 20 décembre 1905 », Mandements, lettres pastorales, circulaires et autres documents publiés depuis son érection, Tome treizième, Montréal, Arbour et Dupont, 1908, p.798.

[31] Ibid., p.809.

[32] Ibid., p.810.

[33] Ibid., pp.816-819.

[34] Statuts refondus du Québec, « Loi de tempérance », section XIV, article 1317, 1909. Cette disposition est aussi intégrée au Code municipal tout au long de la période étudiée.

[35] Ibid., article 1319.

[36] Quebec Branch of the Dominion Alliance for the Total Suppression of the Liquor Traffic, The Battle Against the Bar, The Annual Report of the Quebec Branch of the Dominion Alliance for the Suppression of the Liquor Traffic for the Three Years, Montréal, Babcock & son, printers, 1912, p.34.

[37] Walter Mitchell, Débats reconstitués, 7 février 1918, 14e législature, 2e session.

[38] Harold Bérubé et Amélie Bourbeau, Loc.cit.

[39] Commission des licences de la province de Québec, Rapport de la commission des licences de la province de Québec, Québec, 1913, pp.21-25.

[40] Ibid., pp.26-31

[41] Le Devoir, « Le Canada mis au régime », 12 mars 1918, p.4.

[42] Carolyn Strange and Tina Loo, Making Good : Law and Moral Regulation in Canada, 1867-1939, Toronto, University of Toronto Press, 1997, p.74; Craig Heron, Op.cit., pp.178-182; Marcel Martel, Op.cit., p.91.

[43] La Presse, « Pourquoi la province veut adopter la prohibition totale », 26 janvier 1918, p.9.

[44] Walter Mitchell, Débats reconstitués, 7 février 1918, 14e législature, 2e session.

[45] Ibid.

[46] Joseph-Napoléon Francoeur, Débats reconstitués, 7 février 1918, 14e législature, 2e session.

[47] Peter Bercovitch, Débats reconstitués, 7 février 1918, 14e législature, 2e session.

[48] Le Devoir, « La prohibition en 1919, La chambre la vote unanimement », 8 février 1918, p.1.

[49] Statuts de la province de Québec, « Loi amendant la Loi des licences de Québec », 8 George V, chapitre 23, art.1, 9 février 1918.

[50]Robert Prévost, Suzanne Gagné et Michel Phaneuf, L’histoire de l’alcool au Québec, Montréal, Société des alcools du Québec et Les éditions Alain Stanké, 1986, p.66.

[51] Walter Mitchell, Débats reconstitués, 4 mars 1919, 14e législature, 3e session.

[52] Pour être reconnus comme « légers », les cidres et les vins ne devaient pas contenir plus de 15,09% d’alcool. Ibid.

[53] La Patrie, « La lutte pour le vin et la bière, Les forces modérées s’organisent », 1 avril 1919, p.2.

[54] À la tête du comité on retrouvait Lord Shaughnessy, Sir Alexandre Lacoste, l’hon. Sénateur L.O. David, J.T. Foster, président du Conseil des Métiers et du Travail de Montréal et Joseph Quintal, président de la chambre de commerce de Montréal.

[55] Ruth Elizabeth Spence, Op.cit, p.375.

[56] Ibid., p.378.

[57] La Tempérance, « À nos amis, aux amis de l’ordre et à tout le monde », vol. 10, no 12, 1916, pp.368-371.

[58] La Tempérance, « Le couronnement », vol. 12, no 10, 1918, pp.300-301.

[59] L’Action Catholique, 5 avril 1919, pp.1-2.

[60] Statuts de la province de Québec, « Loi ayant pour objet de prohiber la vente des liqueurs enivrantes et d’amender la loi des licences de Québec en certains cas », 9 George V, Chapitre 18, 17 mars 1919.

[61] Julien Côté, La consultation populaire au Canada et au Québec, 3e éd., Sainte-Foy, Directeur général des élections au Québec, 2000, p.26.

[62] Le Canada, « Majorité écrasante pour le vin et la bière », 11 avril 1919, pp.7-8; Le Devoir, « Nous aurons du vin et de la bière », 11 avril 1919, p.2; La Presse, « Les comtés de la province de Québec », 11 avril 1919, p.1

[63] Arthur Sauvé, Débats reconstitués, 11 février 1920, 15e législature, 1ere session. 

[64] Arthur Sauvé, Débats reconstitués, 13 janvier 1921, 15e législature, 2e session

[65] Le trafic de prescriptions médicales n’est pas propre au Québec, mais s’est développé un peu partout au Canada, voir Craig Heron, Op.cit., 237-239.

[66] Arthur Sauvé, Débats reconstitués, 13 janvier 1921, 15e législature, 2e session

[67] Walter Mitchell, Débats reconstitués, 9 février 1921, 15e législature, 2e session.

[68] L’Avenir du Nord, « Notre fausse loi de prohibition », 9 janvier 1920, p.1.

[69] Walter Mitchell, Débats reconstitués, 9 février 1921, 15e législature, 2e session.

[70] Louis-Alexandre Taschereau, Débats reconstitués, 10 février 1921, 15e législature, 2e session.

[71] Mark Lawrence Schrad, The Political Power of Bad Ideas : Networks, Institution, and the Global Prohibition Wave, New York, Oxford University Press, 2010, p.3.

[72] François Guérard, « L’hygiène publique au Québec : centralisation, normalisation et médicalisation », Recherches Sociographiques, vol. 37, no 2, 1996, pp.203-227.

[73] Les recherches de Marc-Yvan Rouleau (1979), Rolland Glaude (1995) et Richard Yen (1995), ont toutes été produites lors des moments référendaires sur la question nationale visant à établir la souveraineté au Québec.

[74] La municipalité de Verdun, aujourd’hui arrondissement de la ville de Montréal, a maintenu un régime de prohibition complet jusqu’aux années 1960. Les lieux publics de consommation d’alcool aux verres ont toutefois été interdits jusqu’en 2013.

[75] Pour en savoir plus sur la Commission des Liqueurs, voir Caroline Robert, « À qui la faute ? », Le second mouvement de tempérance et l’État au Québec (1870-1922), mémoire de maitrise, Histoire, UQAM, 2019, 139p.

Cet article est également disponible en Anglais

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